GPEC nouvelle application

3 avril 2023

1- C’est quoi la différence entre la GEPP et la GEPC ?

Il n’est souvent pas facile pour les membres du CSE de comprendre la différence entre la Gestion des Emplois et des Parcours Professionnels (GEPP) et la Gestion Prévisionnelle des Emplois et des Compétences (GPEC) et de situer leur rôle par rapport aux organisations syndicales qui sont invitées à négocier la GEPP (Cf. points 2 et 3 par la suite). Certains vont un peu vite en déclarant que la GPEC a laissé la place à la GEPP. En effet, les deux sont étroitement imbriqués comme nous allons le montrer.

Le Ministère du Travail, du plein emploi et de l’insertion continue de diffuser une fiche pratique sur la GEPC. Selon le site du Ministère, la GPEC vise à « adapter les emplois, les effectifs et les compétences aux « exigences » issues de la stratégie des entreprises et des modifications de leurs environnements ». « Il s’agit notamment de :

  • Réduire des difficultés de recrutement,
  • Faire face à un problème de pyramide des âges,
  • Résoudre une situation de sureffectif,
  • Optimiser les dispositifs de formation,
  • Développer la qualification des salariés,
  • Valoriser les compétences individuelles et/ ou collectives,
  • Accompagner des changements dans l’organisation du travail et de la production,
  • Développer les mobilités professionnelles des salariés,
  • Favoriser l’implication des salariés dans un projet d’évolution professionnelle,
  • Anticiper l’adaptation des compétences aux emplois,
  • Maîtriser les conséquences des changements technologiques et économiques,
  • Améliorer la gestion des carrières,
  • Réduire les risques et les coûts liés aux déséquilibres ».

Potentiellement tous ces thèmes sont très importants pour le CSE. Il doit les suivre de près. Il en a l’opportunité dans le cadre de la consultation sur les orientations stratégiques de l'entreprise qui porte, « en outre, sur la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, sur les orientations de la formation professionnelle et sur le plan de développement des compétences » (article L. 2312-34).

L’ambiguïté c’est qu’en présence d'un accord relatif à la GPEC, le CSE n'a pas à être consulté sur cette gestion prévisionnelle dans le cadre de la consultation récurrente sur les orientations stratégiques, selon une décision de la Cour de Cassation Sociale en date du 29 mars 2023 (n°21-17.729). Mais cette décision précise que « si, en présence d'un accord relatif à la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, le comité social et économique n'a pas à être consulté sur cette gestion prévisionnelle dans le cadre de la consultation récurrente sur les orientations stratégiques, sont, en revanche, soumises à consultation les mesures ponctuelles intéressant l'organisation, la gestion et la marche générale de l'entreprise au sens de l'article L. 2312-8 du code du travail, notamment celles de nature à affecter le volume ou la structure des effectifs, quand bien même elles résulteraient de la mise en œuvre de l'accord de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences ».

On peut en déduire que s’il n’y a pas d’accord de GPEC, alors le CSE doit donc être consulté sur la GPEC dans le cadre de la consultation sur les orientations stratégiques…. Le législateur postule donc qu’une GPEC existe même s’il n’y a pas d’accord (ce qui n’est pas intuitif !). Le CSE peut donc formuler un avis motivé sur la prise en compte ou non de ses thèmes dans le cadre des dispositifs de GEPC mis en œuvre par l’employeur. Par contre s’il existe un accord de GPEC, alors le CSE doit être consulté à chaque fois que des mouvements de personnel résultent de la mise en œuvre de l’accord.

2- C’est quoi la négociation sur la GEPP et quel est son lien avec la GPEC ?

L’obligation de négocier sur la Gestion des Emplois et des Parcours Professionnels (GEPP) concerne exclusivement les entreprises et les groupes qui emploient au moins 300 salariés (article L. 2242-20 du code du travail). L’employeur est tenu d’engager tous les trois ans une négociation sur le sujet (article L. 2242-2), mais il s’agit d’une obligation périodique de négocier et non un devoir de conclure.

La négociation obligatoire porte sur la gestion des emplois et des parcours professionnels et sur la mixité des métiers, ce qui recouvre 12 thèmes, dont 7 sont facultatifs.

Les 5 thèmes obligatoires sont :

  • La mise en place d’un dispositif de Gestion Prévisionnelle des Emplois et des Compétences (GEPC), ainsi que les mesures d’accompagnement susceptibles de lui être associées, en particulier en matière de formation, d’abondement du compte personnel de formation, de validation des acquis de l’expérience, de bilan de compétences ainsi que d’accompagnement de la mobilité professionnelle et géographique des salariés autres que celles prévues dans le cadre d’un accord de performance collective (article L. 2254-2) ;la GPEC est un thème obligatoire de la GEPP ;
  • Les grandes orientations à trois ans de la formation professionnelle dans l’entreprise et les objectifs du plan de formation, en particulier les catégories de salariés et d’emplois auxquels ce dernier est consacré en priorité, les compétences et qualifications à acquérir pendant la période de validité de l’accord ainsi que les critères et modalités d’abondement par l’employeur du compte personnel de formation ;
  • Les perspectives de recours par l’employeur aux différents contrats de travail, au travail à temps partiel et aux stages, ainsi que les moyens mis en œuvre pour diminuer le recours aux emplois précaires dans l’entreprise au profit des contrats à durée indéterminée ;
  • Les conditions dans lesquelles les entreprises sous-traitantes sont informées des orientations stratégiques de l’entreprise ayant un effet sur leurs métiers, l’emploi et les compétences ;
  • Le déroulement de carrière des salariés exerçant des responsabilités syndicales et l’exercice de leurs fonctions.

En outre cette négociation peut porter sur :

La négociation prévue sur la gestion des parcours peut aussi également porter sur 6 autres thèmes facultatifs (article L. 2242-21) :

  • La procédure de licenciement collectif et notamment les modalités d’information et de consultation du comité social et économique et, le cas échéant, le cadre de recours à une expertise par ce comité lorsque l’employeur envisage de prononcer le licenciement économique d’au moins dix salariés dans une même période de 30 jours (ce que l’on appelle communément les PSE) ; c’est certainement le thème qui a le plus contribué à cristalliser l’opposition des organisations syndicales à la négociation d’accords incluant ces dispositifs ;
  • La qualification des catégories d’emplois menacés par les évolutions économiques ou technologiques ; c’est un thème souvent abordé dans le cadre des accords « défensifs » visant à organiser les départs de salariés occupant des emplois « sensibles » ;
  • Les modalités de l’association des entreprises sous-traitantes au dispositif de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences de l’entreprise ;
  • Les conditions dans lesquelles l’entreprise participe aux actions de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences mises en œuvre à l’échelle des territoires où elle est implantée ;
  • La mise en place de congés de mobilité ;
  • La formation et l’insertion durable des jeunes dans l’emploi, l’emploi des salariés âgés et la transmission des savoirs et des compétences, les perspectives de développement de l’alternance, ainsi que les modalités d’accueil des alternants et des stagiaires et l’amélioration des conditions de travail des salariés âgés.

3- Qu’est-ce qu’un accord d’adaptation et quel impact sur la négociation de la GEPP ?

A l’initiative de l’employeur ou à la demande d’un syndicat représentatif, les partenaires sociaux peuvent négocier sur le calendrier, la périodicité, les thèmes et les modalités de la négociation dans le groupe, l’entreprise ou l’établissement (articles L. 2242-10 à L. 2242-12). Pour être valable, l’accord doit respecter les conditions de droit commun des accords collectifs et préciser :

  • Les thèmes des négociations et leur périodicité, de sorte que tous les thèmes obligatoires sont négociés au moins une fois tous les 4 ans ;
  • Le contenu de chacun de ces thèmes ;
  • Le calendrier et les lieux de réunions ;
  • Les informations remises par l’employeur aux négociateurs sur les thèmes retenus et la date de cette remise ;
  • Les modalités de suivi des engagements souscrits ;
  • La durée de l’accord, fixée au maximum à 4 ans.

La négociation sur la GEPP s’engage alors dans les conditions prévues par l’accord d’adaptation et au moins une fois tous les 4 ans. A défaut d’accord ou en cas de non-respect de l’accord par l’employeur, la négociation se déroule selon les règles fixées par le code du travail.

4- C’est quoi finalement la GPEC ? sur quoi peut porter l’avis du CSE ?

Des thèmes relevant de la négociation obligatoire sur la GEPP, un seul n’est pas défini, c’est le dispositif de Gestion Prévisionnelle des Emplois et des Compétences (GPEC). Il n’existe aucune définition légale de la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences. Pourtant, il est indispensable de préciser chaque terme pour appréhender les domaines de négociation, en encadrer ses objectifs et pouvoir porter un avis motivé sur le sujet.

Chacun des termes de la GPEC doit être ainsi mieux défini :

  • Les emplois. C’est la liste des emplois occupés par des salariés de l’entreprise, dans le cadre d’un contrat de travail à durée indéterminée ou déterminée, à temps plein ou à temps partiel. Il n’est pas obligatoire d’y ajouter les emplois vacants ou non pourvus dès lors qu’aucun recrutement n’est envisagé. On parle parfois aussi de métiers. Le métier se définit comme un ensemble d’activités professionnelles réalisables par une personne, dans le cadre d’un poste de travail, nécessitant un savoir-faire résultant d’un apprentissage et/ou de l’expérience. Il correspond à un regroupement de postes qui présentent suffisamment de proximité en termes de finalités, d’activités et de compétences pour être exercés par une même personne;
  • Les compétences. Il s’agit de connaissances acquises par l’expérience, par diplôme ou par formation nécessaires à l’exercice de l’activité professionnelle d’un emploi ou d’un métier donné ;
  • La gestion prévisionnelle des emplois. C’est l’évolution possible, en nombre et en nature, des emplois dans les contextes économiques, sociaux et technologiques actuels, ce qui exclut les évolutions imprévisibles du marché ou des technologies, susceptibles d’entraîner pour l’entreprise des bouleversements économiques inattendus, comme le « Brexit », la guerre en Ukraine, où les tensions sur l’énergie et les cours de certaines matières premières ;
  • La gestion prévisionnelle des compétences. Elle correspond à l’évolution des aptitudes et expertises requises pour les emplois nouveaux et pour ceux qui sont en phase d’évolution. Il est possible de différencier ces évolutions entre celles qui par nature affectent le contrat de travail et celles qui ne modifient que les conditions de travail.

Il n’est pas étonnant que certains accords tentent d’abord de mieux définir la GPEC. Dans tous les cas, le CSE doit avoir connaissance des dispositifs mis en œuvre en termes de GEPC : à lui de lister les dispositifs manquants, les dispositifs ne produisant aucun résultat et les dispositifs à renforcer.

N’hésitez pas à solliciter nos conseils sur toutes ces questions liées à la GPEC et à la GEPP.