La convention collective unique de la Métallurgie est entrée en application au 1er janvier 2024. Elle avait été signée par l'UIMM et trois organisations syndicales représentatives de la branche – la CFDT, la CFE-CGC et FO, le 7 février 2022 afin de remplacer les accords nationaux, la convention collective des ingénieurs et cadres, et les conventions et accords territoriaux et sectoriels. Auparavant, 76 conventions collectives au niveau territorial et 25 accords nationaux régissaient la branche. Par la mise en œuvre d’une convention collective unique, plus de 1 600 000 salariés de la branche métallurgie bénéficient désormais d’une même grille de classification et de garanties salariales identiques.
Quelles sont les principales garanties salariales apportés par la nouvelle convention collective nationale de la métallurgie ? Quels sont les points de surveillance pour le CSE ?
Cet article détaille les principales mesures de la convention et revient sur des éléments importants pour les CSE.
1) La nouvelle grille de classification unique des salariés de la branche de la métallurgie
Un des changements majeurs de la nouvelle convention de la métallurgie est la classification des salariés.
En vertu de l’article 60 de la convention, la nouvelle grille de classification prévoit 6 critères.
1 |
Complexité de l’activité |
Difficulté, technicité, diversité du travail, solutions à mettre en œuvre, problèmes à traiter |
2 |
Connaissances |
Savoirs et savoir-faire requis dans l'emploi, acquis par la formation initiale/continue ou l'expérience |
3 |
Autonomie |
Latitude d'action, d'organisation et de décision dans le cadre de l'emploi ; niveau de contrôle associé |
4 |
Contribution |
Effet et influence des actions et décisions sur les activités, l'organisation et son environnement ; nature et importance du champ d'action et de responsabilité |
5 |
Encadrement-coopération |
Appui/soutien, accompagnement/transmission, supervision, encadrement, management/coordination, qu'il s'agisse d'une responsabilité hiérarchique, fonctionnelle ou de projet |
6 |
Communication |
Nature et variété des échanges et des interlocuteurs ; transmission, concertation, négociation, représentation |
Pour chacun de ces critères :
- Un degré de 1 à 10 est attribué : 1 correspondant aux tâches les plus simples et 10 aux tâches les plus complexes ;
- Les points des degrés de chaque critère sont ensuite additionnés.
C’est cette cotation qui permet de déterminer la classe d’emploi et le groupe d’emploi du salarié en le plaçant dans la grille.
Cotations |
Classes d'emplois |
Groupes d'emplois |
58 à 60 |
18 |
I |
55 à 57 |
17 |
I |
52 à 54 |
16 |
H |
49 à 51 |
15 |
H |
46 à 48 |
14 |
G |
43 à 45 |
13 |
G |
40 à 42 |
12 |
F |
37 à 39 |
11 |
F |
34 à 36 |
10 |
E |
31 à 33 |
9 |
E |
28 à 30 |
8 |
D |
25 à 27 |
7 |
D |
22 à 24 |
6 |
C |
19 à 21 |
5 |
C |
16 à 18 |
4 |
B |
13 à 15 |
3 |
B |
10 à 12 |
2 |
A |
6 à 9 |
1 |
A |
Une fois le classement établi, un salaire minimum hiérarchique conventionnel est appliqué pour tous les salariés de la même cotation, au-dessous duquel les salariés ne peuvent pas être rémunérés. Le salaire minimum conventionnel doit respecter le taux de croissance du SMIC en vigueur.
Le référentiel permet ainsi de distinguer 55 cotations, comprises entre 6 et 60 points.
Groupe d'emplois |
Classe d'emplois |
Salaires minimaux conventionnels annuels |
A |
1 |
21 700 € |
A |
2 |
21 850 € |
B |
3 |
22 450 € |
B |
4 |
23 400 € |
C |
5 |
24 250 € |
C |
6 |
25 550 € |
D |
7 |
26 400 € |
D |
8 |
28 450 € |
E |
9 |
30 500 € |
E |
10 |
33 700 € |
F |
11 |
34 900 € |
F |
12 |
36 700 € |
G |
13 |
40 000 € |
G |
14 |
43 900 € |
H |
15 |
47 000 € |
H |
16 |
52 000 € |
I |
17 |
59 300 € |
I |
18 |
68 000 € |
Les montants des salaires minimums conventionnels sont majorés de 15 % ou 30 % pour les salariés relevant d’une convention de forfait en heures ou en jours.
2) Des garanties conventionnelles individuelles de rémunération
L’article 158 de la nouvelle convention collective nationale de la métallurgie du 7 février 2022 prévoit une garantie conventionnelle individuelle de rémunération applicable dès son entrée en vigueur le 1er janvier 2024. Cette garantie permet aux salariés en poste au 31 décembre 2023 de conserver leur rémunération si l'application des dispositions de la nouvelle convention collective entraîne une baisse de cette rémunération.
L’indemnité différentielle sera par principe versée à l’issue de chaque période de 12 mois suivant l’entrée en vigueur de la convention. Toutefois, un versement mensuel ou de manière anticipée peut être envisagé.
Un accord collectif d'entreprise peut également prévoir le versement d'un montant forfaitaire aux salariés concernés chaque année. Cette indemnité forfaitaire se substituera à l'indemnité différentielle.
Pour déterminer le montant de la garantie conventionnelle de rémunération, l’article 160 de la nouvelle convention détaille l’assiette de calcul telle que définie à l’article L.242-1 du Code de la Sécurité Sociale, et les éléments de rémunération pris en compte sont :
- Le salaire contractuel de base ;
- Les contreparties salariales ;
- Les primes forfaitaires ;
- Les avantages en nature.
En revanche, sont exclus de la garantie conventionnelle de rémunération, les éléments suivants :
- La prime d’ancienneté ;
- Les rémunérations variables dues à la réalisation d'objectifs ;
- Les remboursements de frais professionnels ;
- L’intéressement ;
- La réserve spéciale de participation ;
- Les sommes versées par l'employeur à un plan d'épargne entreprise ;
- Les sommes allouées par l'employeur pour le financement des prestations de protection sociale complémentaire ;
- La contribution patronale à l'acquisition de chèques-vacances dans les entreprises de moins de 50 salariés ;
- Les options de souscription ou d'achat d'actions consenties aux salariés de l'entreprise.
L’article 161 de la nouvelle convention de la métallurgie explique comment calculer cette garantie en cas d’année incomplète ou de changements ayant un impact sur les éléments de rémunération pris en compte.
Il convient donc de comparer la rémunération annuelle brute du salarié au 31 décembre 2023, avec la rémunération annuelle brute soumise à cotisations sociale au 31 décembre 2024.
Attention, la comparaison s’effectue pour une même durée de travail. En cas d’absence du salarié au cours de l’année civile de comparaison, ou pour les salariés arrivés en cours d’année 2023, le montant de la rémunération à comparer au montant de la garantie conventionnelle individuelle de rémunération doit être établi sur la base de la rémunération qu’il aurait perçue s’il avait travaillé conformément à sa durée contractuelle prévue.
En cas d’écart, l’indemnité différentielle sera à verser.
Le montant de l’indemnité différentielle pourra évoluer chaque année à hauteur de la différence entre le niveau de la garantie conventionnelle individuelle de rémunération et celui de la rémunération annuelle du salarié.
Comme le prévoit l’article 164 de la convention, la garantie salariale conventionnelle disparaît par contre lorsque le montant différentiel est nul, ou si un accord d'entreprise le prévoit ou si un accord individuel entre l'employeur et le salarié le prévoit.
A titre dérogatoire, les partenaires sociaux ont prévu et négocié à l’article 141 de la convention pour que les entreprises de moins de 150 salariés aient la possibilité de reporter l’application du barème unique d’ici au 1er janvier 2030 si celui-ci entraînait une hausse de la masse salariale supérieure à 5 % pour au moins 25 % de leur effectif. Ceci afin de ne pas entraîner de difficultés économiques dues à la hausse de la masse salariale.
De même, avec la nouvelle classification, certains cadres ont vu leur emploi repositionné en non-cadre. Mais l’article 68 de la nouvelle convention collective de la métallurgie a prévu des garanties salariales transitoires.
Ainsi, les emplois relevant de la catégorie professionnelle des cadres sont ceux classés dans les groupes d'emplois F, G, H et I. Les salariés qui avaient auparavant un niveau cadre mais qui sont classés à un niveau inférieur à F ne l’ont plus depuis le 1er janvier 2024. Ils peuvent toutefois continuer à bénéficier de certaines dispositions aussi longtemps qu’ils restent dans l’entreprise.
3) Les garanties de la prime d’ancienneté
La nouvelle convention collective de la métallurgie prévoit, dans son article 142, une prime d'ancienneté pour les salariés des groupes d'emplois A à E, à partir de 3 ans d'ancienneté dans l'entreprise, et dans la limite de 15 ans.
Le montant de la prime d’ancienneté s'obtient en multipliant la valeur du point par un taux. La valeur du point est négociée au niveau territorial ou sectoriel.
En l'absence d'accord territorial ou sectoriel prévoyant la valeur du point, les signataires de la présente convention ont convenu que la valeur du point applicable est la dernière négociée sur le territoire ou le secteur concerné. Ainsi, la valeur de point qui s’applique au 31 décembre 2023 continue de s’appliquer en 2024 avec l’application de la nouvelle formule de calcul.
Le taux évolue en fonction de la classe d'emplois à laquelle appartient le salarié.
Classe d’emplois |
Taux |
1 |
1,45 % |
2 |
1,60 % |
3 |
1,75 % |
4 |
1,95 % |
5 |
2,20 % |
6 |
2,45 % |
7 |
2,60 % |
8 |
2,90 % |
9 |
3,30 % |
10 |
3,80 % |
La formule à appliquer pour déterminer le montant de la prime d'ancienneté, est la suivante : [(valeur du point X taux) X 100] X nombre d'années d'ancienneté
A titre d’illustration, l’annexe 7 de la convention donne l’exemple suivant :
- Un salarié a 8 ans d’ancienneté dans la même entreprise ;
- Il occupe un emploi classé A1 ;
- La valeur du point sur son territoire est de 5 € ;
- Il travaille sur la base de 35h/semaine.
La prime d’ancienneté est de 58 € mensuels brut : (5*1.45/100) * 100* 8.
Dans le cas où le montant de la prime d’ancienneté applicable avec la nouvelle convention serait inférieur au montant acquis en 2023 par les salariés, pour une même durée de travail, les partenaires sociaux ont prévu une garantie visant à maintenir le montant acquis. Ainsi, sous réserve que l’écart ne provienne que de l’entrée en vigueur de la nouvelle convention de la métallurgie, un complément sera attribué aux salariés concernés.
4) Le rôle du CSE dans la mise en application de la nouvelle convention collective de la métallurgie
L’article 63-1 de la nouvelle CCN Métallurgie prévoit que les employeurs devaient informer et consulter les CSE sur les modalités de mise en œuvre de la nouvelle classification dans les entreprises.
La consultation annuelle sur la politique sociale, les conditions de travail et l’emploi est l’occasion pour le CSE de suivre l’évolution de la structure des rémunérations des salariés. Il peut dans ce cadre se faire assister par un expert-comptable qui pourra accéder à tous les détails des rémunérations individuelles.
L’année 2023 est une base de référence pour les entreprises de la métallurgie pour appliquer les garanties salariales aux salariés concernés. Il est vraiment important que le CSE dispose d’une photographie la plus précise possible de la structure des rémunérations en 2023 pour pouvoir vérifier que tous les salariés n’ont pas été perdants lors du changement de la convention collective.
De plus, lorsque tous les salariés ont bien reçu leur nouvelle cotation, le CSE peut par exemple demander une présentation de la répartition des effectifs dans l’ancienne classification et dans la nouvelle classification, afin de mesurer l’impact des garanties salariales conventionnelles à mettre en œuvre pour l’entreprise.
CE Expertises, cabinet d’expertise comptable spécialiste du CSE, peut vous accompagner dans la vérification de la bonne mise en œuvre des modalités de la nouvelle convention collective de la Métallurgie. Contactez-nous pour en discuter.
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