Les 10 questions à savoir sur la politique sociale

22 février 2023

1. Quels sont les objectifs de cette consultation ?

Vous permettre de rendre un avis motivé, c’est-à-dire de donner l’avis du CSE sur les différentes actions mises en œuvre en termes de rémunérations, de formation, de conditions de travail, d’emploi, etc.

Avec les données de la BDESE et l’aide éventuelle d’un expert-comptable, vous pouvez argumenter sur les points que vous voulez voir améliorer : la manière dont certaines primes sont distribuées entre les salariés, la manière dont on met en œuvre l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, la manière dont on prend en compte les salariés handicapés, les formations proposées aux salariés….

2. Quels sont les avantages de cette consultation ?

C’est une très bonne occasion de demander des explications sur des questions importantes : quelles sont les raisons identifiées à l’absentéisme ? quels sont les leviers d’action identifiées par la direction pour résoudre les problèmes ? ses plans d’actions ?Pourquoi certains postes ne sont-ils pas remplacés ? à quoi tient la rotation du personnel sur certains postes ?

C’est le moment idéal de faire le point sur tous les aspects qui ont un impact sur les salariés et qui sont -au mieux- abordés au fil de l’eau au cours de l’année : état des rémunérations (salaire de base, primes, indemnités, etc.), bilan des formations effectuées (tout le monde a-t-il accès à des formations ? les formations maintiennent-elles l’employabilité ? etc.), l’état des programmes de prévention des accidents du travail, les investissements dans la sécurité, la qualité de vie au travail…

C’est aussi le moment de faire des propositions d’amélioration à votre direction : mise en place de nouveaux systèmes de rémunération, investissements à faire pour améliorer les conditions de travail et la sécurité des salariés, proposer des formations à intégrer dans les plans de formation, etc.

3. Qui met en place cette consultation sur la politique sociale?

C’est à l’employeur de mettre le point à l’ordre du jour chaque année d’une réunion du CSE. Lors de cette réunion, l’employeur doit présenter les éléments de sa politique sociale, des conditions de travail et de l’emploi. Normalement, les données doivent être déjà mises à disposition des membres du CSE dans la BDESE(Cf. question 5), mais pour cette réunion l’employeur doit aussi prévoir une présentation spécifique.

Dans la pratique, cette consultation n’est pas encore menée dans un grand nombre d’organisations. C’est donc le CSE qui doit demander à mettre à l’ordre du jour d’une réunion du CSE le point sur la consultation sur la politique sociale, les conditions de travail et l’emploi.L’employeur ne peut pas refuser de faire cette consultation : elle est obligatoire et cadrée dans le code du travail.

4. Quand faut-il demander à avoir cette consultation sur la politique sociale ?

En début d’année, il est important que le CSE se mette d’accord avec la direction sur le planning retenu pour les trois consultations annuelles obligatoires. Si la direction n’évoque pas le sujet, c’est au CSE d’en faire la demande. Il est possible de mettre à l’ordre du jour de la première réunion du CSE de l’année, le point suivant : « Planning des consultations annuelles. Dates de début des consultations, données communiquées ».

En pratique, à cause des données liées à chaque consultation, certaines contraintes objectives existent :

  • Pour la consultation sur la situation économique et financière, tant que l’organe de contrôle n’a pas approuvé les comptes de l’organisation, il n’est pas possible d’avoir accès aux données. De fait, pour les sociétés qui clôturent leurs comptes au 31 décembre d’une année, après que le service comptable ait mis à jour les dernières écritures, les commissaires aux comptes doivent intervenir, ce qui met plusieurs semaines. Une fois les comptes certifiés, il faut encore qu’ils soient approuvés par l’organe de contrôle (conseil d’administration, etc.). Il est donc préférable de prévoir une consultation à partir du mois d’avril/mai ;
  • Pour la consultation sur la politique sociale, les données sur les rémunérations sont très vite accessibles. Par contre, il faut du temps pour produire un bilan social, un rapport égalité professionnel, un index d’égalité professionnelle, etc. Il est donc préférable de prévoir une consultation à partir du mois de juin/juillet ;
  • Pour la consultation sur les orientations stratégiques, les contraintes sont nettement moins fortes sur les données. Les budgets sont souvent construits et validés lors du dernier trimestre de l’année antérieure et les autres données nécessaires sont plutôt prospectives et prévisionnelles. Il est donc possible de la commencer très tôt dans l’année, à partir du mois de janvier.

Par contre, il est tout à fait anormal de faire commencer les consultations en fin d’année (au mois de novembre/décembre) pour faire le point sur l’année antérieure. Cela perd tout intérêt et prive le CSE de son rôle de proposition.Cette pratique existe pourtant dans certaines entreprises mais c’est au CSE de faire respecter ses droits en insistant auprès de la direction pour que les consultations soient étalées dans l’année et ne commencent pas au dernier trimestre d’une année en cours. Le CSE est aussi en droit de le signaler à l’inspection du travail et de lui demander d’intervenir pour faire respecter ses droits, voire de mandater un avocat spécialisé pour l’aider à pouvoir exercer ses prérogatives.

5. Quelles données doivent être transmises au CSE sur la politique sociale ?

On ne leur répétera jamais assez, il faut déjà que la Base de Données Économiques, Sociales et Environnementales (BDES) soit à jour ! C’est le préalable à toute consultation dont évidemment celle sur la politique sociale. Si elle n’existe pas ou n’est pas à jour, c’est au CSE de demander à la direction de la mettre en place et de l’alimenter. Il est en plus possible d’améliorer son contenu ou le format des informations communiquées.

Dans tous les cas, les informations minimales à faire figurer dans la BDESE sont définies par le code du travail, selon que l’entreprise a moins de 300 salariés ou plus de 300 salariés. Par ailleurs, les informations à donner au CSE sont listées dans l’article L2312-26 du code du travail et dans l’article L2312-27.

Il est courant de plus que la direction fasse en plus de ces informations une présentation synthétique de la politique sociale, les conditions de travail lors de la première réunion avec le CSElorsque le point est abordé. Il n’y a pas de format imposé, mais il est quand même important que la présentation aborde chaque thème (emploi, conditions de travail, formation, rémunérations, etc.).

6. Est-ce que les membres du CSE peuvent poser des questions sur la politique sociale ?

Oui bien sûr et il n’y a évidemment pas de questions idiotes. C’est dans l’esprit même des réunions de CSE de permettre qu’il y ait des questions posées par les membres du CSE.

Il peut s’agir déjà de questions de compréhension : comment a été construit un indicateur utilisé ? à quoi tient une variation ? comment interpréter une nouvelle tendance ? etc.

Mais les élus peuvent aussi demander à avoir des compléments par rapport aux informations communiquées. Si les données ne sont pas assez détaillées, le CSE peut par exemple demander à avoir le nombre de journées d’absence pour maladie selon leur durée, le nombre de journées d’absence avec un distingo pour accidents du travail, des accidents de trajet, pour maladies professionnelles, pour maternité et paternité, pour congés autorisés (enfants malades, etc.), le nombre de journées perdues pour accidents du travail, etc.

Si la direction ne peut pas répondre à ces demandes lors de la réunion, le CSE peut toujours demander à ce que les réponses lui soient envoyées avant la remise de l’avis.

7. Combien de temps a le CSE pour rendre son avis sur la politique sociale ?

Le code du travail a prévu que le CSE ne doive pas rendre son avis le jour même où les informations lui sont exposées. La première réunion (« d’information ») sert avant tout à faire le point sur la politique sociale et les élus peuvent poser toutes les questions qu’ils veulent à la direction.

A défaut d’accord, le CSE a un mois pour rendre son avis motivé. Généralement, le point du rendu de l’avis est mis à l’ordre du jour de la réunion ordinaire suivante du CSE. Mais pour le code du travail, si le CSE n’en rend pas, il est alors réputé avoir été consulté et avoir rendu un avis négatif à l’expiration d’un délai d’un mois.

En cas d’intervention d’un expert, ce délai est porté à deux mois. Il est porté à trois mois en cas d’intervention d’une ou plusieurs expertises dans le cadre de consultation se déroulant à la fois au niveau du CSE central et d’un ou plusieurs CSE d’établissement.

8. Comment rédiger un avis motivé sur la politique sociale ?

Le CSE peut se prononcer par un avis unique portant sur l'ensemble des thèmes énoncés à l’article L2312-26 du code du travail ou par des avis séparés organisés au cours de consultations propres à chacun de ces thèmes.

Le CSE doit avoir en tête que les avis consultatifs sont lus par les salariés et l’employeur. Il faut absolument qu’ils soient clairs, précis et bien argumentés : cela met en valeur le travail des élus et montrent bien ce qu’ils ont demandé à la direction.

Donner un avis positif/favorable ou négatif/défavorable sans aucune explication, n'a aucun sens et ne sert pas à grand-chose. Motiver son avis, c’est expliquer la situation, les points de satisfaction et/ou d’insatisfaction et surtout les points à améliorer par l’employeur par ordre de priorité.

Le CSE doit aussi préciser le plus possibleses contre-propositionsvisant à améliorer l’emploi, la formation, les conditions de travail, la prévention des risques professionnels, etc. Il est toujours beaucoup plus difficile pour un employeur de toutes les refuser et de se justifier sur chacun de ses refus.

L’avis consultatif doit reprendre l’ensemble de ces contre-propositions de façon claire et non équivoque. Lorsque plusieurs contrepropositions ont été formulées, il faut les faire apparaître dans l’avis par ordre de priorité/préférence.

9. Quelle est la valeur ajoutée d’un expert-comptable pour le CSE dans cette consultation ?

Il est prévu que le CSE puisse se faire assister d’un expert-comptable pour auditer la politique sociale. Mais le CSE doit le mandater lors de la première réunion, celle au cours de laquelle la direction commence l’information-consultation. Il est nécessaire de mettre le point à l’ordre du jour de cette réunion et de voter à la fois sur le principe du recours à un expert puis sur le nom du cabinet.

La mission de l’expert-comptable va consister à

  • Aider le CSE à décrypter les choix faits par l'entreprise en termes de politique sociale, de conditions de travail et d'emploi ;
  • Lui restituer les principaux enjeux de ces choix tant par écrit (rédaction d'un rapport) que par oral (tenue de réunions) ;
  • Pointer les spécificités de votre organisation et les points améliorables ;
  • Lui donner des éléments clés pour les négociations (rémunération et temps de travail, qualité de vie au travail, égalité professionnelle, gestion des emplois et des parcours professionnels, mixité des métiers, etc.), notamment en lui donnant des éléments de comparaison avec d'autres organisations de votre secteur et/ou des exemples d'accords innovants signés dans d'autres organisations.

10. Quelles sont les limites de cette consultation ?

L’employeur à l’obligation de demander l’avis du CSE sur la politique sociale, les conditions de travail et l’emploi, mais pas de le suivre. C’est souvent frustrant pour les membres du CSE car ils ont l’impression que leur direction n’a pas tenu compte de leurs propositions.

Le fait d’avoir rédigé et motivé un avis sur la politique sociale permet cependant à tous les membres du CSE de pouvoir expliquer aux salariés ce qu’ils ont fait et demandé à la direction. C’est un outil de communication efficace pour montrer que le CSE cherche à obtenir des avancées pour les salariés.

De plus, il est toujours beaucoup plus difficile pour un employeur de refuser toutes les propositions du CSE et de devoir se justifier sur chacun de ses refus.

N’hésitez pas à solliciter nos conseils sur toutes ces questions liées à la politique sociale.