La masse salariale sert de référence que ce soit pour les négociations salariales (NAO), les négociations lors des PSE (calcul des allocations de congé de reclassement, de rente de pré-retraite, d’indemnités, etc.), le calcul des subventions du CSE, le calcul de la participation, la prime d’intéressement (c'est à l'accord d’intéressement de définir la notion de salaire retenue), etc. Comment calculer la masse salariale ? Cet article reprend, en 5 questions clés, les informations essentielles à connaître par les CSE sur la masse salariale et les rémunérations brutes.
1. Comment se calcule la masse salariale ?
La définition la précise qui sert de référence est celle donnée par l’Urssaf :
• La masse salariale correspond à l’assiette salariale totale, dite « assiette déplafonnée », Elle désigne le montant total des rémunérations sur lesquelles repose le calcul des cotisations des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales, c’est-à-dire le salaire de base auquel s’ajoutent des compléments légaux, conventionnels ou attribués à l’initiative de l’employeur, sous forme de commissions, de primes, de rémunération des heures supplémentaires, de gratifications et d’avantages en nature. Les indemnités de rupture ne sont incluses dans l’assiette déplafonnée qu’à partir d’un seuil correspondant à deux fois le plafond annuel de la Sécurité sociale (en 2024, 46 368 € x 2 = 92 736 €).
• L’assiette déplafonnée se distingue de l’assiette « Contribution Sociale Généralisée » (CSG) qui comprend également des éléments de rémunération non soumis à cotisations sociales. Elle est notamment constituée des éléments assujettis au forfait social, en particulier l’intéressement, la participation, une partie des indemnités de rupture conventionnelle, l’abondement de l’employeur aux plans d’épargne salariale et le financement de certains éléments de retraite supplémentaire. Hors forfait social, l’assiette CSG comprend également des indemnités versées lors de la rupture du contrat de travail ou bien en cas de chômage partiel. Le financement de la prévoyance complémentaire figure également dans ce segment.
2. Quelle masse salariale est prise en compte pour le calcul des subventions de fonctionnement et des œuvres sociales du CSE et pour le calcul de la participation ?
Le budget de fonctionnement du CSE est calculé sur la masse salariale brute de l'entreprise, c'est-à-dire l'ensemble des rémunérations versées et soumises aux cotisations de sécurité sociale :
- 0,20 % de la masse salariale brute pour les entreprises de 50 à 1 999 salariés.
- 0,22 % de la masse salariale brute pour les entreprises de 2 000 salariés et plus.
Le budget pour les Activités Sociales et Culturelles (ASC) est librement fixée par accord d’entreprise ou convention collective. En l'absence d'accord, la contribution annuelle est calculée en fonction de la contribution à la masse salariale brute de l’année précédente et ne peut être inférieure.
Sauf engagement plus favorable, la masse salariale servant au calcul de la subvention de fonctionnement du comité comme de la contribution aux activités sociales et culturelles s'entend de la masse salariale brute constituée par l'ensemble des gains et rémunérations soumis à cotisations de sécurité sociale en application de l'article L 242-1 du Code de la Sécurité Sociale.
Les indemnités compensatrices de congés payés, de conversion monétaire de compte épargne-temps et de contrepartie obligatoire en repos ont un caractère salarial et ne peuvent donc pas être déduites de la masse salariale servant au calcul de la subvention de fonctionnement du comité.
Aux termes des articles L 2315-61 et L 2312-83 du Code du travail, sont exclues de l'assiette de calcul de la subvention les indemnités versées à l'occasion de la rupture du contrat de travail à durée indéterminée. Par contre, les indemnités versées à l'occasion de la rupture du contrat à durée déterminée, notamment l'indemnité de fin de contrat, sont intégrées dans l'assiette de calcul de la subvention.
Certaines sommes, exclues de l'assiette des cotisations (sous conditions, totalement ou partiellement) n'entrent pas dans l'assiette de calcul de la subvention de fonctionnement du CSE. Il s'agit :
- Des contributions des employeurs destinées au financement des régimes obligatoires de retraite complémentaire et des prestations complémentaires de retraite et de prévoyance, pour la fraction comprise dans la limite d'exonération de cotisations sociales ;
- Des avantages alloués aux salariés au titre des régimes légaux de participation, d'intéressement et d'actionnariat ;
- Les sommes attribuées en application de l'accord d'intéressement, n'ayant pas le caractère de rémunération au sens de l'article L 242-1 du Code de la Sécurité Sociale, n'entrent pas dans la masse salariale servant au calcul de la subvention de fonctionnement au comité.
Le calcul de la réserve spéciale de participation (RSP) est le résultat de la formule suivante :
RSP = ½ [B – 5 % C] x [S / VA]
S correspond à la somme totale des salaires versés par l’entreprise au personnel : les salaires retenus pour le calcul de la participation sont les revenus d'activité pris en compte pour la détermination de l'assiette des cotisations définie à l'article L 242-1 du Code la Sécurité Sociale (Code du travail article D 3324-1), qu'ils soient ou non assujettis à cotisations sociales. Ils comprennent les indemnités de congés payés versées par les caisses de congés payés.
Nous avons déjà évoqué dans un article les possibilités d’action du CSE pour améliorer la participation.
3. Quelles sont les données salariales transmises chaque mois par les employeurs via la Déclaration Sociale Nominative (DSN) ?
La DSN transmets les données issues de la paie des entreprises et des employeurs publics : informations individuelles, contrats de travail, rémunérations et primes reçues, cotisations versées, absences et reprises, et données descriptives RH dès lors qu’elles sont gérées en paie. Elle s’inscrit dans un cadre réglementaire défini par la loi de simplification de mars 2012 concernant l’allègement des démarches administratives. Les données DSN sont communes aux organismes de protection sociale et à l’administration fiscale.
La transmission des données via la DSN se fait de façon mensuelle (la paie étant mensualisée depuis 1986) et porte sur l’entièreté de la paie telle que pratiquée informatiquement : des revenus bruts jusqu’à la détermination de ce qui est versé au salarié, en passant par les cotisations (versées aux organismes de protection sociale, et aux administrations via le prélèvement à la source), en fonction de ce que le gestionnaire connait de la situation des personnes au moment où il établit la paie.
En DSN, la rémunération correspond aux montants bruts nés de la « contrepartie » de l’activité de l’individu dans le cadre du contrat. Sont notamment distingués :
- La rémunération brute non plafonnée correspond à l’ensemble des rémunérations, primes, gratifications et indemnités de départ et autres, dont l’assiette est assujettie à cotisations de Sécurité Sociale (toujours selon l’article L242-1 du Code de la Sécurité sociale).
- Le salaire brut servant aux calculs des droits de l'Assurance chômage représente la rémunération permettant le calcul de l’Assurance chômage. Il contient les éléments de salaire mais n’inclut pas les primes et les indemnités versées en fin de contrat, ni en cours d’exercice.
- Le salaire rétabli ou reconstitué : lorsque le salaire à un mois donné n’est pas complet, ce salaire rétabli permet à l’employeur de déclarer le salaire qu’aurait perçu le salarié s’il avait travaillé de façon complète – comme valorisé selon l'article R. 323-8 du Code de la Sécurité. Il est notamment utilisé par la CNAM pour le calcul des Indemnités Journalières de Sécurité Sociale (IJSS), le plus souvent en cas d’absence du salarié. Dans le cas d'un contrat à temps partiel, le salaire est rétabli à hauteur de la rémunération du temps partiel.
- Le salaire de base correspond à la rémunération brute habituelle du salarié à l'exclusion des compléments de salaire, qu'ils soient légaux, conventionnels ou attribués à l'initiative de l'employeur. Il correspond généralement à la première ligne du bulletin de salaire. Les heures supplémentaires structurelles, contrairement aux heures supplémentaires aléatoires, sont à prendre en compte dans le salaire de base. Il est notamment utilisé par la CNAM dans certains cas de reconstitutions des indemnités journalières.
En DSN, les éléments de revenu brut de périodicité non mensuelle et non directement liés à l’exécution de l’activité peuvent être déclarés de manière spécifique. A noter que ces éléments sont intégrés à la rémunération brute et servent donc à la constitution des bases assujetties. Il peut s’agir par exemple des primes suivantes :
- Primes et gratifications annuelles (primes de fin d'année, de 13e mois, de vacances, de bilan, de participation, etc.)
- Primes relatives au rattrapage du coût de la vie (primes de vie chère, primes de productivité, etc.)
- Primes liées à la personne (prime d'assiduité, de ponctualité, d'ancienneté, etc.)
- Primes relatives à certaines conditions de travail (pénibilité, travaux dangereux et insalubres, astreinte, etc.)
Il peut aussi s’agir par exemple des indemnités suivantes :
- Indemnité légale de fin de CDD
- Les indemnités de licenciement
- Les indemnités de mise à la retraite
- Les indemnités d'expatriation, etc.
En DSN, d’autres éléments de revenu brut non portés par les données rémunération et prime, indemnité et gratification peuvent être déclarés. Certaines parties des montants des autres éléments de revenu brut peuvent être assujettis à contribution ou cotisation sociales et doivent, à ce titre, être intégrés dans la valorisation de certaines rémunérations. Les principaux types sont :
- Les avantages en nature : ce sont des biens ou des services fournis aux salariés de l’entreprise gratuitement par l’employeur ou moyennant une participation inférieure à leur valeur réelle, une voiture de fonction par exemple ;
- Les frais professionnels (réels ou forfaitaires) : ce sont des dépenses faites par le salarié qui lui sont ensuite remboursées par l'employeur (frais de restauration, déplacement, vestimentaires par exemple) ;
- Les sommes versées par un tiers : quand le salarié perçoit une gratification de la part de quelqu'un qui n'est pas son employeur ;
- L'épargne salariale (les abondements au plan d’épargne) : c’est un système collectif d'épargne qui permet aux salariés d'acheter des valeurs mobilières (actions, obligations, etc.) avec l'aide de l'entreprise (cela peut prendre la forme de PEE, PEI, PERCO ou PERECO) ;
- L’intéressement : c’est un dispositif d'épargne salariale lié aux résultats ou aux performances de l'entreprise. Le salarié bénéficiaire de l'intéressement perçoit une prime dont le montant et les conditions de versement sont fixés par l'accord d'entreprise ou par la décision unilatérale ;
- La participation patronale aux frais de transports ou au financement de titres-restaurant, à l’image de la participation aux frais de carte NAVIGO ;
- La participation de l'employeur aux chèques vacances et la participation au financement des services à la personne relèvent quant à eux du champ fiscal.
Les données transmises via la DSN sont une mine d’informations pour le CSE car elles permettent de comprendre les différents éléments entrant dans la composition des rémunérations individuelles et le calcul de la masse salariale globale. Les détails de tous ces éléments doivent être abordés dans le cadre notamment de la consultation sur la politique sociale, les conditions de travail et l’emploi. Le CSE peut se faire assister dans cette consultation par un expert-comptable, rémunéré par l’employeur, qui peut accéder à toutes ces données.
4. Que recouvre la rémunération brute qui sert à calculer le montant net social qui apparaît sur les bulletins de salaire ?
L’arrêté du 31 janvier 2023 a introduit un nouvel agrégat : le montant net social. Le montant net social figure obligatoirement sur les bulletins de salaire depuis le 1er juillet 2023.
L’ensemble des ressources du salarié est pris en compte, quel que soit leur traitement social ou fiscal. L’ensemble de la rémunération brute du salarié est pris en compte, indépendamment des exonérations, déductions, abattements ou franchises applicables et de l’assujettissement fiscal ou social.
Les éléments qui n’entrent pas en ligne de compte sont soit des données de paie qui ne sont pas des revenus soit, par exception, certains éléments de revenu qui restent totalement non pris en compte.
Eléments pris en compte pour déterminer la rémunération brute |
Eléments non pris en compte |
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Le montant « net social » est différent des autres montants nets existants :
- Le « net à payer », qui figure le plus souvent en bas du bulletin de paie, correspond au montant effectivement versé au salarié par l’employeur et doit permettre au salarié de vérifier que l’ensemble des calculs sont exacts. Ce montant tient compte de toutes les déductions, notamment de l’ensemble des cotisations sociales et du prélèvement à la source, mais prend également en compte certains éléments annexes (exemple : saisies sur salaires, remboursement de frais professionnels, participation du salarié aux titres restaurants, retenue pour la cantine, etc.) qui ne correspondent pas à des revenus ou à des charges déductibles. Figure également sur le bulletin de paye, pour rappel, le « net à payer avant impôt », qui correspond à la somme nette à payer qu’aurait perçue le salarié si le prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu n’avait pas été mis en place depuis 2019. Cette deuxième information est donc donnée pour simple information ;
- Le revenu « net fiscal » (ou « net imposable ») correspond aux sommes soumises au prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu. En effet, l’assiette de l’impôt sur le revenu est spécifique et il est donc nécessaire de la faire apparaître de manière distincte : certains revenus ne sont pas assujettis à l’impôt (par exemple les heures supplémentaires exonérées, la PPV avec une limite en termes de plafond, etc.), d’autres versements sont au contraire soumis à l’impôt mais pas à cotisations (par exemple les contributions des employeurs à la complémentaire santé) tandis que certaines charges ne sont pas déductibles (une partie de la CSG et la CRDS notamment).
Les salariés font souvent remonter aux membres du CSE les erreurs relevées sur leur fiche de paie. Ils ont en effet 3 ans pour contester le montant ou l’exactitude de leur fiche à partir de leur remise. Il est donc important que le CSE maîtrise le calcul de la masse salariale et les détails des calculs qui aboutissent aux montants apparaissant sur les fiches de paie.
Il est aussi indispensable que les négociateurs lors d’un PSE maîtrisent bien ces montants car ils servent de base à de nombreuses mesures (rémunération prise comme référence dans le calcul de l’allocation de congé de reclassement, dans le calcul de l’allocation de pré-retraite, etc.).
5. Quels sont les effets qui peuvent impacter l’évolution de la masse salariale ?
Plusieurs mécanismes impactent l’évolution de la masse salariale chaque année.
Des évolutions de structure de la masse salariale :
- L’effectif : entrées et sorties des salariés d’une année sur l’autre,
- La structure de l’emploi : évolution de la répartition entre les catégories socio-professionnelles (exemple : cadres / non cadres),
- L’ancienneté : remplacement de salariés plus anciens par des salariés jeunes moins bien rémunérés par exemple,
- La rémunération : augmentation générale et/ou individuelle.
Le Glissement Vieillissement Technicité (GVT) :
Il correspond à l’évolution de la masse salariale entre 2 périodes en raison :
- Du glissement : via les augmentations individuelles,
- Du vieillissement : via les augmentations liées à l’ancienneté,
- De la technicité : via les augmentations liées aux promotions.
La connaissance de la masse salariale brute est essentielle pour le CSE, tant pour connaître ses budgets alloués que pour négocier avec la Direction.
CE Expertises peut vous accompagner pour clarifier ces différents points, comprendre la structure des rémunérations et vous donner les montants exacts auxquels vous référer. Cet accompagnement peut se faire soit dans le cadre de la consultation sur la politique sociale, les conditions de travail et l’emploi, soit dans un autre cadre défini avec le CSE. N’hésitez pas à nous contacter.
Pour aller plus loin :