Plan social : les statistiques clés à avoir en tête
Le plan de sauvegarde de l’emploi (PSE), communément appelé plan social, joue un rôle crucial dans les licenciements économiques collectifs.
Depuis la Loi relative à la sécurisation de l’emploi (LES) du 14 juin 2013, le cadre juridique des PSE a été profondément remanié, conformément aux dispositions issues de l’accord national interprofessionnel (ANI) signé le 11 janvier 2013 par 3 syndicats (CFDT, CFTC et CFE-CGC) et 3 organisations patronales (MEDEF, CGPME, UPA).
L’ANI avait pour but de voir « renforcer le dialogue social dans les procédures de licenciement économique » en permettant aux entreprises de signer des accords majoritaires avec les organisations syndicales représentatives, et ainsi « améliorer » le contenu des plans sociaux ou plans de sauvegarde de l’emploi (PSE).
Selon le rapport de juin 2023 établi par le Ministère du travail, du plein emploi et de l’insertion, intitulé « 10 ans après la loi sur la sécurisation de l’emploi : quel bilan pour les plans de sauvegarde de l’emploi », en presque 10 ans le nombre de plans sociaux homologués par la DREETS a été divisé par 2.
Cet article présente les statistiques clés du bilan des dix ans de la Loi sur la sécurisation de l’emploi notamment l'évolution du nombre de plans sociaux, les procédures d'information-consultation des CSE, les tendances en matière de départs volontaires et de reclassements, ainsi que les mesures d'accompagnement mises en place pour les salariés concernés, l'augmentation des recours judiciaires initiés par les salariés et les implications de ces contestations sur l'efficacité des procédures de PSE.
Quelle est l’évolution du nombre de plans sociaux depuis la Loi de sécurisation de l’emploi ?
La Loi de sécurisation de l’emploi (LSE) avait vocation à développer la négociation collective dans les plans sociaux. Elle cherchait à donner plus de pouvoir aux représentants des salariés et à l’État, tout en encadrant les procédures d'information et de consultation dans des délais fixés.
La LSE a fortement poussé à la négociation lors des restructurations. Ainsi, depuis 2015, environ 80 % des plans sociaux sont négociés avec la participation d’au moins une organisation syndicale. Lorsqu’une entreprise opte pour la négociation, cela aboutit généralement à la signature d’un accord majoritaire, avec un taux de validation qui a augmenté tout au long de la décennie, passant de 84 % en 2015 à 90 % en 2022.
En 2022, 70 % des PSE ont tenté la voie de la négociation, avec une validation d’accord majoritaire dans 9 cas sur 10.
La proportion de plans sociaux ayant abouti à un accord collectif majoritaire dans les entreprises « in bonis », c’est-à-dire en bonne santé financière, est passée de 67 % en 2015 à 75 % en 2018, avant de diminuer à 63 % en 2022.
La baisse constatée à partir de 2019 s'explique par l'introduction en janvier 2018 du dispositif de rupture conventionnelle collective (RCC), qui a partiellement supplanté le plan de départs volontaires autonome. La crise sanitaire a également influencé la diminution du recours à la négociation, certains employeurs préférant des solutions unilatérales jugées plus rapides.Depuis 2014, le nombre de plans sociaux initiés a diminué, passant de 780 en 2014 à 325 en 2022, avec un pic de 861 PSE en 2020 du fait de la crise sanitaire. Le nombre de PSE ayant fait l’objet d’une décision favorable par l’administration suit cette tendance, passant de 752 à 299 entre 2014 et 2022, avec un pic en 2020 à 612 PSE validés ou homologués.
Malgré ces fluctuations, le nombre moyen de ruptures de contrats par plans sociaux validés ou homologués par l’administration est resté stable, autour de 85.
*Graphique issu du document « 10 ans après la loi de sécurisation de l’emploi : Quel bilan pour les plans de sauvegarde de l’emploi », DGEFP, juin 2023.
L’information-consultation des CSE dans le plan social
La Loi de sécurisation a introduit des délais encadrant la durée des procédures d’information-consultation des CSE lors de plan social.
La durée d’une procédure d’information-consultation est régie par l’article L1233-30 du code du travail :
- 2 mois lorsque le nombre de ruptures de contrat de travail est inférieur à 100
- 3 mois s’il est compris entre 100 et 249
- 4 mois lorsque qu’il est au moins égal à 250.
A l’issue de ces délais, en l’absence d’avis, le CSE est réputé avoir été consulté. La loi prévoit la possibilité de déroger à ces durées par la voie d’un accord collectif.
Entre 2014 et 2022, environ 60 % des procédures d’information-consultation ont respecté les délais préfix légaux. Cette proportion est plus élevée, aux 2/3, pour les plans sociaux impliquant au moins 250 ruptures. Les procédures qui dépassent les délais préfix sont souvent celles ayant recours à un accord collectif PSE, permettant ainsi plus de temps pour la négociation.
* Tableau issu du document « 10 ans après la loi de sécurisation de l’emploi : Quel bilan pour les plans de sauvegarde de l’emploi », DGEFP, juin 2023.
Les départs volontaires et les reclassements concentrés
En moyenne, parmi les plans sociaux entre 2018 et 2021 :
- 63 % des salariés concernés ont été licenciés
- 25 % ont opté pour un départ volontaire
- 12 % ont été reclassés en interne.
Les entreprises de 1 000 salariés ou plus offrent plus souvent des départs volontaires (45 %) et des reclassements internes (16 %) comparé aux petites entreprises, comme le montrent les graphiques ci-dessous.
*Graphique issu du site de la DARES, Dares Focus n°6, janvier 2024
Ce graphique présente la répartition des salariés concernés par un plan social validé ou homologué entre 2018 et 2021, selon la taille de l’entreprise. La taille des entreprises est catégorisée en cinq groupes : moins de 100 salariés, 100 à 149 salariés, 150 à 499 salariés, 500 à 999 salariés, et 1000 salariés ou plus.
Chaque barre représente le nombre moyen de ruptures de contrats et de mobilités/reclassements internes par PSE, réparti en plusieurs types :
- Licenciements économiques (en rouge) : Constituent la majorité des ruptures dans toutes les tailles d’entreprises, particulièrement élevé dans les entreprises de moins de 100 salariés (89%) et de 100 à 149 salariés (81%).
- Départs volontaires (en bleu) : Plus fréquents dans les entreprises de 1000 salariés ou plus (53%) et de 150 à 499 salariés (21%).
- Mobilités et reclassements internes (en jaune) : Représentent une part importante dans les grandes entreprises de 1000 salariés ou plus (13%).
- Ruptures de contrats envisagées à la demande de validation-homologation (en noir) : Indiquées par des points noirs, ces ruptures sont mentionnées pour chaque catégorie de taille d'entreprise.
La lecture des données montre notamment que les mobilités et reclassements internes, ainsi que les départs volontaires, augmentent avec la taille de l’entreprise.
*Graphique issu du site de la DARES, Dares Focus n°6, janvier 2024
Ce graphique présente la répartition des salariés concernés par un plan social validé ou homologué entre 2018 et 2021, selon le type de demande et la nature de la procédure. Les catégories de procédure sont : Homologation, Validation, Redressement Judiciaire ou Liquidation Judiciaire (RJLJ), et Droit commun.
Chaque barre représente le nombre moyen de ruptures de contrats et de mobilités/reclassements internes par PSE, réparti en plusieurs types :
- Licenciements économiques (en rouge) : Majoritaires dans toutes les catégories de procédure, notamment dans les cas de RJLJ (91%) et d’Homologation (80%).
- Départs volontaires (en bleu) : Plus fréquents dans les procédures de Validation (37%) et de Droit commun (36%).
- Mobilités et reclassements internes (en jaune) : Observés surtout dans les procédures de Validation (11%) et d’Homologation (7%).
- Ruptures de contrats envisagées à la demande de validation-homologation (en noir) : Indiquées par des points noirs pour chaque catégorie de procédure.
Les données révèlent que les licenciements économiques sont prédominants dans les procédures de PSE, particulièrement dans les cas de RJLJ et d’Homologation, tandis que les départs volontaires et les mobilités/reclassements internes sont plus courants dans les procédures de Validation et de Droit commun.
Quelles sont les principales mesures d’accompagnement retenues par les salariés concernés par un plan social ?
Pour toute mise en œuvre de plan social, les entreprises doivent organiser des mesures d'accompagnement pour faciliter le reclassement externe des salariés licenciés ou qui choisissent un départ volontaire.
Les mesures les plus fréquemment utilisées par les salariés d’un plan social sont :
- L’accompagnement par une antenne emploi, pour 80 % des salariés concernés, disponible dans 89 % des PSE
- Le financement de formations, pour 54 % des salariés
- Les aides à la création d’entreprise, pour 10 % des salariés.
Si un congé de reclassement est proposé, 71 % des salariés choisissent d’y participer.
* Tableau issu du document « 10 ans après la loi de sécurisation de l’emploi : Quel bilan pour les plans de sauvegarde de l’emploi », DGEFP, juin 2023.
Le contentieux des décisions d’homologation et validation des PSE : l’augmentation des recours initiés par les salariés
Le contentieux des PSE comprend plusieurs types de contentieux :
- Le contentieux administratif lié à l’élaboration du PSE
- Le contentieux judiciaire lié à la mise en œuvre collective ou individuelle du PSE
- Le contentieux pénal en cas de délit d’entrave.
Depuis 2013, moins de 8 % des décisions administratives en matière de PSE ont fait l’objet de recours. Les recours sont principalement initiés par les salariés.
Avant la loi de sécurisation de l’emploi, les actions judiciaires durant l’élaboration du PSE étaient portées par les instances représentatives du personnel et les syndicats. Désormais, les salariés sont les premiers requérants des recours pour excès de pouvoir.
Cela montre que le dialogue social n’exempt pas de toute contestation, même si les plans sociaux ayant fait l’objet d’une négociation collective sont quand même moins sujets aux recours.
Entre 2013 et 2022, il y a eu 427 recours devant les tribunaux administratifs, 239 requêtes en appel, et 132 pourvois en cassation devant le Conseil d’État.
Le taux de recours et d’annulation a diminué au fil des années. C’est en 2022 qu’ont été enregistrés les taux de recours et d’annulation les plus bas (4 %).
A la date du rapport, seules 19,49 % des décisions de justice conduisent à une annulation de la décision administrative.
Les motifs de contentieux sont principalement :
- L’irrégularité de la procédure d’information-consultation du CSE
- Le caractère suffisant du PSE au regard des moyens du groupe
- Le respect par l’employeur de son obligation de prévention des risques en matière de santé et sécurité au travail devient un moyen de plus en plus fréquemment soulevé
- Le respect des critères d’ordre et des catégories professionnelles.
* Tableau issu du document « 10 ans après la loi de sécurisation de l’emploi : Quel bilan pour les plans de sauvegarde de l’emploi », DGEFP, juin 2023.
* Tableau issu du document « 10 ans après la loi de sécurisation de l’emploi : Quel bilan pour les plans de sauvegarde de l’emploi », DGEFP, juin 2023.
En conclusion, bien que le nombre de plans sociaux ait diminué, les négociations prennent de plus en plus d’importance. Les recours en justice contre les décisions administratives sont rares, et les taux d'annulation ont significativement baissé.
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