Le Temps Partiel Thérapeutique : que faut-il savoir ?

15 juillet 2024

 

Le temps partiel thérapeutique (TPT), également appelé mi-temps thérapeutique, est une mesure prévue par le Code du travail permettant à un salarié de reprendre progressivement son activité professionnelle après une période de maladie ou d'accident du travail, ou de réduire son activité pour des raisons médicales, avec l'objectif de permettre une réadaptation progressive à l'emploi et compatible avec son état de santé.

Il n’est désormais plus nécessaire d’avoir bénéficié d’un arrêt de travail pour pouvoir se voir prescrire un temps partiel thérapeutique (art. L323-3 du Code de la Sécurité Sociale).

Cet article vise à clarifier pour les élus des CSE, la durée du travail en TPT, les étapes de sa mise en œuvre, ainsi que ses impacts sur le contrat de travail, la rémunération et les droits sociaux des salariés.

Quelle est la durée de travail d’un temps partiel thérapeutique (TPT) ?  

La durée du travail du temps partiel thérapeutique n’est pas obligatoirement à mi-temps (50%). S’agissant d’un temps partiel, elle peut être supérieure, sans toutefois pouvoir dépasser 35h/semaine.

Elle peut également être inférieure. Toutefois, conformément au Code du travail, la durée hebdomadaire ne peut être inférieure à 24h/semaine, sauf en raison de contraintes personnelles (article L3123-27 Code du travail).
L’avis du médecin dans le cadre du temps partiel thérapeutique peut s’analyser comme une contrainte personnelle et permettre au salarié de travailler moins de 24h/semaine.

Les horaires de travail doivent être définis en fonction des préconisations du médecin, d’un commun accord entre l’employeur et le salarié.

La notion de temps partiel ne s'applique pas aux salariés en forfait jours puisqu’ils n'ont pas de référence horaire au regard de l’autonomie dont ils disposent dans l'organisation de leur travail. Toutefois, un allégement de la charge de travail peut leur être préconisé.
Un avenant peut également suspendre temporairement l'application de la convention de forfait pour la durée du "temps partiel thérapeutique" pour pouvoir appliquer des horaires spécifiques.

Quelles sont les étapes de mise en œuvre d’un temps partiel thérapeutique ?

1) La demande de temps partiel thérapeutique doit être initiée par le médecin du salarié. Celui-ci doit estimer que le salarié est en état de reprendre ou d’effectuer une activité partielle, tout en bénéficiant de soins ou pendant une convalescence. Le médecin doit indiquer le pourcentage d’activités que le salarié est en capacité d’effectuer.

2) L'employeur doit donner son accord pour aménager le poste de travail conformément aux recommandations médicales. Il doit établir une attestation reprenant les modalités du temps partiel thérapeutique (répartition des jours et des heures de travail, poste occupé…).

3) Si le salarié se voit prescrire un temps partiel thérapeutique après un arrêt de travail, une visite médicale de pré-reprise est obligatoire.

Si le salarié se voit prescrire un temps partiel thérapeutique en cours d’exécution de son contrat de travail, ou après un arrêt de travail n’imposant pas l’organisation d’une visite de pré-reprise, l’employeur n’est pas tenu de saisir le médecin du travail. Il a tout intérêt malgré tout à se rapprocher du service de santé au travail pour organiser le temps partiel thérapeutique du salarié au mieux.

Lors de sa visite médicale de pré-reprise, le salarié doit obtenir l’accord du médecin du travail.
En effet, ce dernier doit vérifier que le salarié est apte à la reprise de son poste et détermine les aménagements à apporter.
Le médecin du travail peut proposer à l'employeur des mesures individuelles d'aménagement, d'adaptation ou de transformation du poste de travail. Il peut également proposer des mesures d'aménagement du temps de travail.

S’il estime que l’état de santé du salarié est incompatible avec le poste, il préconise un changement de poste ou déclare le salarié inapte à son poste de travail.

4) La prescription médicale du médecin traitant et l’attestation de l’employeur doivent être envoyés à la caisse primaire d'assurance maladie.
La CPAM donne ou non son accord pour que le salarié puisse bénéficier d’indemnités journalières au titre du temps partiel thérapeutique.

L’employeur peut-il refuser la mise en place d’un temps partiel thérapeutique ?

En principe, l’employeur est lié par l’avis médical et ne peut refuser la mise en place d’un temps partiel thérapeutique pour un salarié.
Toutefois, en cas de motif légitime, l’employeur peut exceptionnellement opposer un refus.
Par exemple, si la mise en place du temps partiel thérapeutique engendre d’importantes contraintes d’organisation (ex : désorganisation d’un service).

En cas de refus, l'employeur doit faire connaître les motifs qui s'opposent à ce qu'il soit donné une suite favorable, par écrit, au salarié et à la médecine du travail (articles L4624-6 et R4624-6 du Code du travail).

L’avis du médecin du travail peut-il être contesté par l’employeur ou par le salarié ?

L’avis du médecin du travail peut être contesté, par l’employeur ou par le salarié, en référé dans un délai de 15 jours à compter de la notification de la décision.

Le salarié peut-il refuser les aménagements proposés par l’employeur pour le temps partiel thérapeutique ?

C'est la jurisprudence de la Cour de cassation qui a dégagé une solution de principe. Ainsi, ne constitue pas nécessairement une faute grave, le fait de refuser un aménagement de poste. Toutefois, les décisions peuvent différer selon l’appréciation des faits par les juges du fond.

Dans un arrêt de la Cour de cassation, un salarié à temps partiel thérapeutique qui avait refusé l’aménagement proposé par son employeur s’était vu licencier pour faute pour insubordination.
La Cour de cassation a retenu que le salarié n'avait commis aucun acte d'insubordination de sorte que le refus de l'aménagement de poste ne pouvait constituer une faute.

Dans un autre arrêt, la Cour de cassation avait précisé que la faute grave doit être appréciée « in concreto » et que ne commet pas une faute grave le salarié qui refuse de travailler dans des conditions incompatibles avec les préconisations du médecin du travail.

A l’inverse, le refus par un salarié des mesures proposées par son employeur alors qu’elles sont conformes aux recommandations du médecin du travail est jugé abusif (Cour de cassation, ch. sociale, 19 juillet 1994 n°90-41362).

Quelles sont les conséquences du temps partiel thérapeutique sur le contrat de travail ?

Le salarié conserve les mêmes droits que lorsqu'il travaillait à temps plein. Son contrat de travail n’est plus suspendu comme c’était le cas pendant son arrêt maladie.
L’employeur doit le réintégrer dans les conditions fixées par le médecin, conformément à son obligation de sécurité. Le salarié doit être réintégré dans son emploi précédent ou, à défaut, sans un emploi similaire.
L'impossibilité de réintégration dans le précédent emploi est établie lorsque celui-ci n'existe plus ou n'est plus vacant, ou qu'il ne peut être pourvu à temps partiel, même dans un but thérapeutique.

Un salarié en temps partiel thérapeutique ne peut pas être licencié au motif que l’employeur ne veut pas prendre en compte le temps partiel thérapeutique. Le licenciement serait considéré sans cause réelle et sérieuse.
Il peut par contre être licencié pour un motif autre que l’inaptitude : licenciement pour motif disciplinaire ou pour motif économique, comme tout autre salarié.

Le salarié en temps partiel thérapeutique peut également envisager une rupture conventionnelle au même titre que les autres salariés de l’entreprise.

Quels sont les impacts du temps partiel thérapeutique sur la rémunération, les indemnités, les congés… ?

1- L’impact du temps partiel thérapeutique sur le salaire

Le temps partiel thérapeutique entraîne une réduction du temps de travail et, par conséquent, une baisse proportionnelle du salaire. Cependant, cette perte de salaire est compensée par les indemnités journalières versées par la Sécurité sociale. Le salarié perçoit ainsi un revenu composé de son salaire à temps partiel et des indemnités journalières.

L'indemnité journalière est calculée selon les règles de droit commun de l'assurance maladie, mais son montant ne peut pas être supérieur à la perte de gain journalière résultant du passage à temps partiel thérapeutique (art. L 323-3 et R 323-3 du Code de la Sécurité Sociale).
Le salaire du salarié à temps partiel thérapeutique est retenu au prorata de sa durée de travail, dans les mêmes conditions que les autres salariés.
Depuis le 1er janvier 2023, la formule à appliquer est la suivante : somme totale des heures prévues dans le cadre du temps partiel thérapeutique / durée légale de travail (ou conventionnelle si elle est inférieure).

2- Le montant des indemnités journalières pendant le temps partiel thérapeutique

Les indemnités journalières (IJ) sont égales à 50 % du salaire journalier de base.
Pour connaître le salaire journalier de base, il faut additionner les 3 derniers salaires bruts perçus avant l’arrêt de travail et les diviser par 91,25.

En cas d’arrêt de travail, les IJ ne peuvent être versées que pendant une durée maximale de 3 ans. Mais dans le cas de la mise en œuvre d’un temps partiel thérapeutique à la suite, la CPAM peut décider de prolonger ce délai de versement d’un an.

Si au terme du temps partiel thérapeutique, le salarié ne peut pas reprendre son activité professionnelle à temps plein, il pourra faire une demande de reconnaissance d’invalidité.

3- Les congés payés pendant le temps partiel thérapeutique

Le Code du travail ne prévoit pas de dispositions spécifiques pour l’acquisition de congés payés pendant le temps partiel thérapeutique.
Ainsi, qu'il soit ou non à temps partiel pour motif thérapeutique, le salarié acquiert 2,5 jours de congés payés par mois de travail effectif. Cela représente donc 30 jours ouvrables de congés payés par an.
Même s’il ne travaille que quelques jours par semaine, il se verra par contre décompter le même nombre de jours de congés qu’un salarié à temps plein.

4- Les indemnités de licenciement pendant un temps partiel thérapeutique

Les indemnités de licenciement sont calculées en fonction de l'ancienneté du salarié et de sa rémunération brute. En cas de licenciement durant une période de temps partiel thérapeutique, les indemnités de licenciement doivent être calculées sur la base du salaire de référence de la rémunération à temps plein que le salarié percevait avant de passer en temps partiel thérapeutique, afin de ne pas le pénaliser.

L’article L1132-1 du Code du travail indique qu’un salarié ne peut pas faire l’objet d’une mesure discriminatoire en raison de son état de santé. Ainsi, le 12 juin 2024, la Cour de cassation a jugé que, pour le calcul des indemnités de rupture pour un salarié absent pour maladie, il convient de neutraliser ces périodes pour calculer son salaire de référence et de ne prendre en compte que les salaires versés avant les arrêts de travail.

5- La participation et l’intéressement pendant le temps partiel thérapeutique

La participation et l'intéressement sont des dispositifs de partage des bénéfices au sein de l'entreprise.

Dans un arrêt du 20 septembre 2023, la Cour de cassation a confirmé que le temps partiel thérapeutique ne peut pas minorer la participation. Il ne peut y avoir aucune discrimination en raison de l’état de santé du salarié. La période de temps partiel thérapeutique doit être assimilée à une période de présence dans l’entreprise pour la répartition de la participation aux résultats.

Dans un arrêt du 16 juin 2011, la Cour de cassation a considéré qu’un prorata ne doit pas être appliqué pour le versement de la prime d’intéressement pour un salarié ayant bénéficié d’un arrêt de travail.

6- Les impacts du temps partiel thérapeutique sur la retraite

Hormis pour les salariés de la fonction publique, le temps partiel thérapeutique a des conséquences sur les droits à la retraite du salarié. En effet, la période de temps partiel thérapeutique est prise en compte pour le calcul des trimestres de retraite, mais les cotisations versées sont proportionnelles au salaire réduit. Les indemnités journalières ne sont pas prises en compte dans le salaire annuel brut moyen.

Pour valider un trimestre de retraite, un salarié doit cotiser sur la base d'un revenu minimum fixé par la Sécurité sociale.
Le salarié en temps partiel thérapeutique valide des trimestres de retraite de la même manière qu’un salarié à temps plein, pour autant que ses cotisations atteignent le seuil minimum requis.
Depuis 2014, pour valider un trimestre pour la retraite, il faut que les revenus du salarié soient égaux à 150 fois le taux horaire du SMIC (11,65 euros bruts en 2024) soit 1 747,50 € en 2024. Pour valider 4 trimestres, les salariés doivent donc avoir perçu 6 990 euros par an.

Si les salaires ne permettent pas de valider des trimestres cotisés, car le salaire est inférieur au seuil, le salarié peut valider des trimestres assimilés pour arrêt-maladie. Les IJ versées par la CPAM permettent de valider 1 trimestre pour 60 jours d'indemnités, dans la limite de 4 trimestres par an. Ces trimestres ne peuvent pas se cumuler avec ceux qui peuvent être validés par le salaire.

Pour toute question sur le temps partiel thérapeutique et l’application des modalités pratiques dans votre entreprise, CE Expertises, l’expert-comptable spécialiste du CSE, peut vous accompagner. Il s’agit d’un thème que nous abordons dans le cadre de nos missions sur la politique sociale, les conditions de travail et l’emploi. N’hésitez pas à nous contacter !

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