Le vote électronique pour les élections du CSE : quels points de vigilance ?

22 avril 2025

Depuis l'ordonnance n° 2017-1386 du 22 septembre 2017 et son décret d'application n° 2017-1819 du 29 décembre 2017, le recours au vote électronique est autorisé pour les élections professionnelles, y compris pour la désignation des membres du Comité Social et Économique (CSE).
Le vote électronique est régi par les articles L2314-26 et R2314-5 à R2314-17 du Code du travail, et suppose le respect d’un formalisme strict visant à garantir la sincérité, la confidentialité et la sécurité du scrutin.
Ce mode de scrutin vise à :

  • Faciliter la participation électorale ;
  • Sécuriser le processus électoral ;
  • Moderniser l’organisation des élections, notamment dans les entreprises multisites, avec du télétravail, ou ayant un personnel dispersé.

Attention cependant car le vote électronique n’est pas un droit automatique pour l’employeur, il suppose un cadre formalisé.
Ce mode de scrutin peut aussi coexister avec le vote physique (à bulletin secret sous enveloppe).

L'organisation du vote électronique peut être décidée :

  • Par accord collectif (accord d'entreprise, de groupe ou de branche) signé avec les délégués syndicaux ou, à défaut, par une majorité des membres du CSE ;
  • À défaut d'accord, par décision unilatérale de l'employeur après information-consultation du CSE.

Dans les deux cas, le recours au vote électronique doit être expressément prévu dans le Protocole d'Accord Préélectoral (PAP) et respecter l'ensemble des exigences techniques et juridiques fixées par la loi. Toutefois, un simple protocole d’accord préélectoral ne suffit pas à lui seul pour instaurer le vote électronique : il ne peut en être que le complément, précisant les modalités pratiques de l’organisation du scrutin (Cour de cassation, 03/11/2016, n°15-21.574).

 

1) Quels sont les points de vigilance que le CSE doit avoir en amont et pour tout recours au vote électronique ?

L'objectif est de s’assurer que le vote électronique, comme toute modalité de vote, est soumis aux principes fondamentaux du droit électoral :

  • Liberté et secret du vote ;
  • Caractère personnel du vote ;
  • Égalité d’accès au scrutin pour tous les électeurs.

Ces principes sont intangibles. Par exemple, un salarié ne peut pas confier à un collègue sa clé ou ses codes d’accès pour voter à sa place. La Cour de cassation a d’ailleurs jugé qu’une telle pratique entraîne l’annulation des élections.

De même, l’employeur a l’obligation de veiller à ce que tous les salariés, même ceux n’ayant pas de poste informatique ou de bureau, puissent exercer leur droit de vote dans des conditions matérielles satisfaisantes.

Le CSE doit donc être particulièrement attentif à plusieurs points essentiels avant de donner son feu vert.

Thématiques Points de vigilance
Sécurisation du système
Information et assistance aux électeurs
  • Vérifier que tous les salariés (en poste, itinérants, en télétravail ou absents) puissent accéder facilement à leur espace de vote. Aucun électeur ne doit être écarté du scrutin. Si les précautions ne sont pas prises, une atteinte au principe général d'égalité face à l'exercice du droit de vote est commise. Dans ce cas, le scrutin peut être annulé (Cour de cassation, 1er juin 2022, n°20-22860).
  • Exiger une assistance technique et une hotline, y compris pendant la période de vote (art. R2314-10 du Code du travail).
Respect du rôle du bureau de vote
  • Le bureau de vote reste responsable du bon déroulement du scrutin, même en cas de vote électronique.
  • Une notice explicative du système est remise à chaque salarié, et les membres du CSE ainsi que le bureau de vote bénéficient d’une formation obligatoire.
  • Le CSE peut demander à maintenir la compétence pleine du bureau de vote : c’est lui, et non le prestataire, qui valide la régularité du scrutin.
  • L’élection peut se dérouler sur plusieurs jours. Dans ce cas, les conditions d’éligibilité et de qualité d’électeur sont appréciées à la date d’ouverture du scrutin (Cour de cassation, 23/03/2022, n°20-20.047 ; 09/11/2022, n°21-23.301).

2) Quels points le CSE peut-il négocier dans la mise en œuvre du vote électronique ?

Lorsque le recours au vote électronique est envisagé, le CSE dispose de marges de négociation sur les modalités techniques et organisationnelles, les conditions de sécurité, les opérations de contrôle, et les garanties pour les électeurs.

Thématiques Point de négociation Propositions
Modalités techniques et organisationnelles Le système retenu devra respecter les principes généraux du droit électoral indispensables à la régularité du scrutin.
  • Sincérité et intégrité du vote : conformité entre le bulletin choisi par l’électeur et le bulletin enregistré dans l’urne électronique
  • Anonymat et secret du vote : impossibilité d’établir un lien quelconque entre un vote émis et un électeur en particulier
  • Unicité du vote : impossibilité de voter à nouveau pour un même scrutin avec les mêmes moyens d’authentification
  • Confidentialité et liberté du vote : exercice du droit de vote sans pression extérieure
  • (Cour de cassation, 20/10/1999, n°98-60.359)
Les caractéristiques de la plateforme de vote
  • Ergonomie
  • Accessibilité aux personnes en situation de handicap
  • Accessibilité aux personnes absentes (arrêt maladie, congé parental, etc…)
  • Sécurité
Les délais d'ouverture et de clôture du scrutin
  • Amplitude
  • Plages horaires
  • Vote anticipé ou non
Possibilité d’un système mixte
  • Vote électronique
  • Vote physique pour certains cas particuliers (pas d’accès à l’informatique – alternative non numérique)
Compétence du bureau de vote Maintenir la compétence pleine du bureau de vote au CSE C’est le CSE (et non le prestataire) qui valide la régularité du scrutin.
Conditions de sécurité Authentification des électeurs
Traçabilité et intégrité du vote
  • Registre des votes
  • Chiffrement des données
  • Organisation de tests préalables avec les membres du bureau de vote
Garanties pour les électeurs Accès facile pour tous, y compris les salariés sans poste informatique ou absents
  • Borne de vote
  • Solution mobile
  • Envoi de codes sécurisés par courrier ou SMS

Ainsi, si le vote électronique est un gain de modernité, il n’est pas sans risque s'il est mal encadré.

Si l’employeur est responsable de la conformité du système, même lorsqu'il fait appel à un prestataire, le CSE a un rôle de vigilance mais aussi de négociation des modalités de déroulement du vote et des conditions de mise en œuvre.

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