Les budgets du CSE : comment bien les différencier et les utiliser ?

10 février 2025

Le Comité Social et Économique (CSE) bénéficie de deux budgets distincts pour remplir ses missions. Ces budgets permettent de répondre aux besoins économiques, administratifs et sociaux des salariés, tout en respectant des règles strictes d’utilisation.
Ces deux budgets, indépendants l’un de l’autre, obéissent à des règles d’affectation strictes. Leur gestion exige une rigueur particulière pour éviter tout transfert illégal ou toute utilisation abusive. Cet article explore les fondements, les utilisations concrètes et les passerelles budgétaires existantes.

Budget CSE

1) Les budgets du CSE : fondements et principes

Dans les entreprises comptant au moins 50 salariés, pour remplir ses missions, le CSE bénéficie de deux sources de financement distinctes :

  • Une subvention versée par l'employeur pour assurer son fonctionnement (art. L.2315-61 du Code du travail), qui couvre les frais nécessaires aux missions économiques, professionnelles et administratives du CSE ;
  • Une contribution dédiée à la gestion des activités sociales et culturelles mises en œuvre par le CSE (art. L.2312-81 du Code du travail), qui finance les avantages et services pour les salariés et leurs familles.

Ces deux budgets sont totalement indépendants et sont soumis à des modalités de calcul spécifiques :

  • Le budget de fonctionnement ne peut pas financer des activités sociales et culturelles ;
  • Le budget ASC ne peut pas être utilisé pour des frais administratifs ou autres dépenses de fonctionnement.

La Cour de cassation a récemment réaffirmé le principe de séparation des budgets (Cour de cassation, 20/10/2021, n°20-14.578), précisant que la subvention de fonctionnement, distincte de celle dédiée aux activités sociales et culturelles, implique une stricte autonomie budgétaire. En conséquence, tout transfert entre ces deux budgets est interdit, sauf dans les cas expressément prévus par la loi détaillés par la suite.

2) Les budgets du CSE : exemples concrets d’utilisation

Dépenses autorisées

Budget de Fonctionnement

Frais de fonctionnement
courants

 

  • Les rémunérations et charges sociales des salariés éventuellement recrutés directement par le CSE pour des tâches administratives (par exemple : un steno en charge des réunions et des procès-verbaux, ou un comptable pour la gestion des comptes).
  • Les fournitures et services divers : matériel de bureau, abonnement internet, téléphonie, fax, frais postaux, frais bancaires…
  • Les prestations externes : impression de documents, assistance téléphonique, consultation d’avocats ou accompagnement juridique.
  • Les achats de documentation technique.
  • Les déplacements des membres du CSE dans le cadre de leurs missions (incluant les frais de déplacement, de repas et d’hébergement), sauf si ces déplacements s'effectuent sur le temps de travail ou pour se rendre aux réunions organisées à l'initiative de l'employeur.

Le CSE dispose d’une liberté dans l’utilisation des ressources de son budget de fonctionnement, à condition que celles-ci soient strictement utilisées dans le cadre de son fonctionnement et de ses missions économiques (Cour de cassation, 27/03/2012, n°11-10.825).

Frais d’expertises

Attributions sociales et économiques

  • Les actions menées dans le cadre des activités sociales et économiques, telles que le financement de l'organisation de campagnes d'information, ou des frais occasionnés par le fonctionnement des commissions obligatoires et facultatives.

Formations

  • Les frais de formation économique des membres du CSE doivent être imputés sur le budget de fonctionnement : frais pédagogiques, de déplacement et d'hébergement.
  • Les frais liés aux formations supplémentaires (suppléants, titulaires au-delà des 5 jours légaux, membres des commissions représentants de proximité…) sont également pris en charge par la subvention de fonctionnement.

Dépenses exclues

 

  • Les activités sociales et culturelles.
  • Les cadeaux ou aides de secours aux salariés.
  • Des abonnements à la presse syndicale sans lien avec les attributions économiques.
  • Des aides humanitaires en faveur de pays en difficulté.
  • Des frais personnels des membres du CSE qui ne sont pas liés à l'exercice de leur mission.

 

Dépenses autorisées

Activités Sociales et Culturelles

Activités sociales et culturelles établies dans l'entreprise au bénéfice des
Salariés, ou anciens salariés et de leur famille (art. R.2312-35 du Code du travail)

 

  • Les institutions sociales de prévoyance et d'entraide.
  • Les activités tendant à l'amélioration des conditions de bien-être (cantines, coopératives de consommation, logements, jardins familiaux, crèches, colonies de vacances…).
  • Les activités relatives à l'utilisation des loisirs et l'organisation sportive.
  • La protection sociale complémentaire (hors celle obligatoire).
  • Les activités éducatives et culturelles : prêts de livres, de cd et de matériel audiovisuel, service de billetterie, bibliothèques, vidéothèques.
  • L’organisation de spectacles, de conférences et d'expositions, l’abonnement à des revues, chèques-lire, chèques-vacances…

La Cour de cassation définit l'œuvre sociale comme toute activité non obligatoire légalement, quels qu'en soient sa dénomination, la date de sa création et son mode de financement, exercée principalement au bénéfice du personnel de l'entreprise, sans discrimination en vue d'améliorer les conditions collectives d'emploi, de travail et de vie du personnel au sein de l'entreprise (Cour de cassation, 13/11/1975, n°3-14.848).

L’affectation sur le budget de fonctionnement de certains achats de communication doit être faite avec prudence. Par exemple, l’achat d’objets publicitaires, ou goodies avec le logo du CSE à destination des salariés, sont en principe affectés sur le budget des activités sociales et culturelles car considérés comme des cadeaux.
Toutefois, si ces achats ont pour objectif de faire connaître le CSE et son activité, et peuvent donc être considérés comme une diffusion de communication, le CSE peut choisir de l’affecter au budget de fonctionnement.
Cela nécessite néanmoins une grande vigilance car l’URSSAF pourrait le considérer comme un avantage en nature et procéder à un redressement.

3) Quelles sont les passerelles budgétaires entre le budget de fonctionnement et le budget des activités sociales et culturelles du CSE ?

Si le CSE n’utilise pas l’intégralité de ses budgets, il a la possibilité de placer les fonds non utilisés pour générer des intérêts et optimiser sa trésorerie. Il peut également envisager des investissements immobiliers, comme l’achat d’appartements dans des résidences de vacances, qui pourraient être loués une partie de l’année aux salariés et à leurs familles.
Quelles que soient les opérations menées, les dépenses et recettes doivent rester associées au budget d’origine, qu’il s’agisse de la subvention de fonctionnement ou de la contribution dédiée aux activités sociales et culturelles.

1) Le CSE a aussi la possibilité, sous certaines conditions et dans des limites spécifiques, de transférer une partie de l'excédent budgétaire d’un budget à un autre.

 

Transfert du budget de fonctionnement vers le budget des activités sociales et culturelles (ASC)

Transfert du budget des activités sociales et culturelles (ASC) vers le budget de fonctionnement

 

Le CSE peut décider d’affecter une partie ou la totalité de l’excédent annuel du budget de fonctionnement au budget destiné aux activités sociales et culturelles, dans une limite maximale de 10 % de cet excédent (art. L.2315-61 et R.2315-31-1 du Code du travail).

 

L'excédent annuel du budget destiné aux activités sociales et culturelles peut être transféré, dans la limite de 10 % de cet excédent, soit au budget de fonctionnement, soit à des associations (art. L.2312-84 et R.2312-51 du Code du travail).

Attention, si le CSE a procédé à un transfert d’excédent annuel du budget de fonctionnement vers le budget ASC au cours des 3 années précédentes, et que le budget de fonctionnement devient insuffisant pour couvrir le coût de certains frais d’expertise, l’employeur n’est pas dans l’obligation d’en couvrir le coût.
A l’inverse, le financement de certains frais d'expertise devra être pris en charge par l'employeur lorsque le CSE ne peut plus payer sa quote-part avec sa subvention de fonctionnement. Le CSE ne peut ensuite plus décider de transférer d'excédents du budget de fonctionnement au financement des activités sociales et culturelles pendant les trois années suivantes.

4) Quelles sont les sanctions en cas de mauvaise utilisation des budgets ?

Si le CSE commet une erreur dans l’imputation d’une dépense sur l’un ou l’autre budget, il pourra être condamné à réintégrer les sommes utilisées à tort. L’article 314-1 du Code pénal considère la mauvaise utilisation des budgets comme un abus de confiance qui peut être puni de 5 ans d’emprisonnement et de 375 000 € d’amende.

5) Quels sont les principes applicables en matière de cotisations sociales ?

Toute somme ou avantage en nature accordé à un salarié par le CSE est soumis à cotisations sociales, sauf dans les cas suivants :

  • Lorsque cette somme est versée en tant que secours ;
  • Si une loi ou un décret prévoit explicitement une exonération ;
  • Si elle relève d’une tolérance administrative reconnue.

Le guide pratique 2025 de l’URSSAF à destination des CSE rappelle que les prestations liées aux activités sociales et culturelles proposées par le CSE bénéficient d’une exonération de cotisations sociales. Cela inclut les activités sociales, culturelles ou de loisirs, destinées aux salariés, anciens salariés, et leurs familles.

L’Urssaf y explicite le traitement à apporter à l’utilisation de la subvention des œuvres sociales. Le tableau ci-dessous précise les montants pour 2025.

Œuvres sociales

Cotisations

Aide financière (services à la personne et gardes d’enfant)

Exonération de cotisations et contributions sociales dans la limite des frais réellement engagés par le salarié et dans la limite d’un plafond annuel. Pour apprécier ce seuil, il est nécessaire de cumuler la participation du CSE et celle de l’employeur (2.540 € en 2025).

Prime d’anniversaire de l’entreprise

Soumis à cotisations et contributions sociales.

Bon d’achat

Exonération de cotisations et contributions sociales si le montant total des bons d’achat et des cadeaux en nature attribués à un salarié au cours de l’année civile ne dépasse pas 5 % du plafond mensuel de Sécurité sociale (196 € au 1er janvier 2025).

Les cotisations et contributions sociales sont dues si le montant total des bons d’achat et des cadeaux en nature attribués à un salarié au cours de l’année civile dépasse 5 % du plafond mensuel de Sécurité sociale (196 € au 1er janvier 2025), sauf si 3 conditions sont remplies :

    • Une attribution pour un évènement qui concerne le salarié (mariage, naissance, rentrée scolaire, Noël…) ;
    • Une utilisation déterminée en lien avec l’évènement ;
    • Un montant conforme aux usages.

Cantine

Aucune cotisation et contribution sociale n’est due si la participation salariale au prix du repas est supérieure ou égale à 2,72 € (2025).

Les cotisations et contributions sociales sont dues sur la valeur forfaitaire de l’avantage en nature (5,45 € en 2025) sous déduction de la participation salariale, si la participation salariale au prix du repas est inférieure à 2,72 €.

Chèques-vacances

Les cotisations et contributions sociales sont dues si le CSE participe à l’acquisition des chèques-vacances avec l’employeur, la participation du CSE est considérée comme un complément de rémunération.

Les cotisations et contributions sociales sont exonérées si le CSE acquiert les chèques-vacances sans participation de l’employeur.

Colonies de vacances

Exonération de cotisations, sous réserve d’attestations d’inscriptions.

Décès d’un membre de la famille du salarié

Exonération de cotisations si l’aide est d’un montant inférieur ou égal à 5 % du plafond mensuel de la Sécurité sociale (soit 196 euros en 2025).
Au-delà de ce montant, la preuve du secours doit être apportée, ce qui nécessite une analyse individuelle de la situation.

Prime et bourse d’études

Soumises à cotisations et contributions sociales.

Prime de fête des pères et fête des mères, prime d’anniversaire, prime de naissance…

Soumises à cotisations et contributions sociales.

Formations, cours de langues, permis de conduire, BAFA

Soumise à cotisations et contributions sociales.

Prime de logement

Soumises à cotisations et contributions sociales.

Médaille du travail

Exonération de cotisations et contributions sociales si la prime globale (celle du CSE et/ou celle de l’employeur) est inférieure ou égale au salaire mensuel de base du salarié.

La fraction excédentaire est soumise à cotisations et contributions sociales si la prime globale est supérieure au salaire mensuel de base du salarié.

Les primes versées lors de l’attribution d’une médaille d’entreprise sont soumises à cotisations et contributions sociales.

Prévoyance

Exonération de cotisations sociales en tant que contribution patronale s’il s’agit de contrats à caractère collectif et à adhésion obligatoire.

L’exonération est limitée à la fraction n’excédant pas 6% du plafond annuel Sécurité sociale (2.826 euros pour 2025) et 1,5% de la rémunération soumise aux cotisations de Sécurité sociale sans que le total ainsi obtenu, puisse excéder 12 % du plafond annuel de la Sécurité sociale (5.652 euros pour 2025).
Il est nécessaire de cumuler la participation du CSE et celle de l’employeur. Cette participation est soumise au forfait social de 8 % et entre dans l’assiette CSG et CRDS.

Prix en nature à titre aléatoire et exceptionnel

Exclusion des assiettes sociales.

Prix en récompense de performances professionnelles

Soumis à cotisations sociales.

Prime de retraite

Soumis aux cotisations de droit commun. Les versements échelonnés, versés après la rupture du contrat de travail, sont soumis à la cotisation d’assurance maladie, à la CSG et à la CRDS.

Spectacles

Exonération de cotisations et contributions sociales.

Réduction d’abonnements ou de cotisations de pratique sportive

Exonération de cotisations et contributions sociales.

Titres-restaurants

La participation du CSE à l’acquisition de titres-restaurant est exonérée de cotisations et contributions sociales si la participation globale (CSE + employeur) est comprise entre 50 et 60 % de la valeur du titre-restaurant et si cette participation ne dépasse pas 7,26 € (2025).

Vacances

Les participations favorisant le départ en vacances de la famille ou des enfants seuls sont exonérées de cotisations.

Les primes de vacances accordées indistinctement à tous les salariés sont soumises à cotisations.

Voyages

Exonération de cotisations et contributions sociales.

Les prestations proposées par le CSE doivent être accessibles à tous les salariés, sans distinction ni discrimination, comme l’a tranché la Cour de cassation dans un arrêt du 03 avril 2024. Il est interdit de différencier les bénéficiaires en fonction de critères professionnels tels que le type de contrat (CDI ou CDD), la catégorie professionnelle, le volume horaire travaillé (temps plein ou partiel) ou la présence effective dans l’entreprise.
L’ancienneté ne peut plus être utilisée comme critère pour attribuer les avantages du CSE. Ils ont jusqu’au 31 décembre 2025 pour adapter leurs pratiques et aligner leurs critères de distribution sur la réglementation. En cas de contrôle, si des conditions d’ancienneté sont encore appliquées, le CSE devra corriger sa politique pour respecter la loi.

Il est toutefois possible de moduler les montants des avantages en s’appuyant sur des critères sociaux objectifs, comme le quotient familial ou le revenu fiscal de référence. Ces critères doivent être clairs, transparents, connus de tous, et définis dans les accords ou conventions collectives. Cette modulation ne doit pas avoir pour effet d’exclure certains salariés du bénéfice des prestations.

La gestion des budgets du CSE repose sur une différenciation stricte et le respect des passerelles budgétaires légales. En optimisant l’utilisation des ressources et en anticipant les besoins, le CSE peut répondre efficacement à ses obligations économiques et sociales.
Une planification bien maîtrisée peut aussi permettre de valoriser les excédents, en favorisant des investissements durables ou des actions sociales élargies.

CE Expertises, cabinet d’expertise comptable spécialisé dans les CSE, peut vous accompagner pour les questions relevant de la gestion des budgets du CSE, et vous aider à les optimiser. Contactez-nous pour en discuter !