Le Comité Social et Économique (CSE) bénéficie de deux budgets distincts pour remplir ses missions. Ces budgets permettent de répondre aux besoins économiques, administratifs et sociaux des salariés, tout en respectant des règles strictes d’utilisation.
Ces deux budgets, indépendants l’un de l’autre, obéissent à des règles d’affectation strictes. Leur gestion exige une rigueur particulière pour éviter tout transfert illégal ou toute utilisation abusive. Cet article explore les fondements, les utilisations concrètes et les passerelles budgétaires existantes.
1) Les budgets du CSE : fondements et principes
Dans les entreprises comptant au moins 50 salariés, pour remplir ses missions, le CSE bénéficie de deux sources de financement distinctes :
- Une subvention versée par l'employeur pour assurer son fonctionnement (art. L.2315-61 du Code du travail), qui couvre les frais nécessaires aux missions économiques, professionnelles et administratives du CSE ;
- Une contribution dédiée à la gestion des activités sociales et culturelles mises en œuvre par le CSE (art. L.2312-81 du Code du travail), qui finance les avantages et services pour les salariés et leurs familles.
Ces deux budgets sont totalement indépendants et sont soumis à des modalités de calcul spécifiques :
- Le budget de fonctionnement ne peut pas financer des activités sociales et culturelles ;
- Le budget ASC ne peut pas être utilisé pour des frais administratifs ou autres dépenses de fonctionnement.
La Cour de cassation a récemment réaffirmé le principe de séparation des budgets (Cour de cassation, 20/10/2021, n°20-14.578), précisant que la subvention de fonctionnement, distincte de celle dédiée aux activités sociales et culturelles, implique une stricte autonomie budgétaire. En conséquence, tout transfert entre ces deux budgets est interdit, sauf dans les cas expressément prévus par la loi détaillés par la suite.
2) Les budgets du CSE : exemples concrets d’utilisation
Dépenses autorisées |
Budget de Fonctionnement |
Frais de fonctionnement |
Le CSE dispose d’une liberté dans l’utilisation des ressources de son budget de fonctionnement, à condition que celles-ci soient strictement utilisées dans le cadre de son fonctionnement et de ses missions économiques (Cour de cassation, 27/03/2012, n°11-10.825). |
Frais d’expertises |
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Attributions sociales et économiques |
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Formations |
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Dépenses exclues |
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Dépenses autorisées |
Activités Sociales et Culturelles |
Activités sociales et culturelles établies dans l'entreprise au bénéfice des |
La Cour de cassation définit l'œuvre sociale comme toute activité non obligatoire légalement, quels qu'en soient sa dénomination, la date de sa création et son mode de financement, exercée principalement au bénéfice du personnel de l'entreprise, sans discrimination en vue d'améliorer les conditions collectives d'emploi, de travail et de vie du personnel au sein de l'entreprise (Cour de cassation, 13/11/1975, n°3-14.848). L’affectation sur le budget de fonctionnement de certains achats de communication doit être faite avec prudence. Par exemple, l’achat d’objets publicitaires, ou goodies avec le logo du CSE à destination des salariés, sont en principe affectés sur le budget des activités sociales et culturelles car considérés comme des cadeaux. |
3) Quelles sont les passerelles budgétaires entre le budget de fonctionnement et le budget des activités sociales et culturelles du CSE ?
Si le CSE n’utilise pas l’intégralité de ses budgets, il a la possibilité de placer les fonds non utilisés pour générer des intérêts et optimiser sa trésorerie. Il peut également envisager des investissements immobiliers, comme l’achat d’appartements dans des résidences de vacances, qui pourraient être loués une partie de l’année aux salariés et à leurs familles.
Quelles que soient les opérations menées, les dépenses et recettes doivent rester associées au budget d’origine, qu’il s’agisse de la subvention de fonctionnement ou de la contribution dédiée aux activités sociales et culturelles.
1) Le CSE a aussi la possibilité, sous certaines conditions et dans des limites spécifiques, de transférer une partie de l'excédent budgétaire d’un budget à un autre.
Transfert du budget de fonctionnement vers le budget des activités sociales et culturelles (ASC) |
Transfert du budget des activités sociales et culturelles (ASC) vers le budget de fonctionnement |
Le CSE peut décider d’affecter une partie ou la totalité de l’excédent annuel du budget de fonctionnement au budget destiné aux activités sociales et culturelles, dans une limite maximale de 10 % de cet excédent (art. L.2315-61 et R.2315-31-1 du Code du travail). |
L'excédent annuel du budget destiné aux activités sociales et culturelles peut être transféré, dans la limite de 10 % de cet excédent, soit au budget de fonctionnement, soit à des associations (art. L.2312-84 et R.2312-51 du Code du travail). |
Attention, si le CSE a procédé à un transfert d’excédent annuel du budget de fonctionnement vers le budget ASC au cours des 3 années précédentes, et que le budget de fonctionnement devient insuffisant pour couvrir le coût de certains frais d’expertise, l’employeur n’est pas dans l’obligation d’en couvrir le coût.
A l’inverse, le financement de certains frais d'expertise devra être pris en charge par l'employeur lorsque le CSE ne peut plus payer sa quote-part avec sa subvention de fonctionnement. Le CSE ne peut ensuite plus décider de transférer d'excédents du budget de fonctionnement au financement des activités sociales et culturelles pendant les trois années suivantes.
4) Quelles sont les sanctions en cas de mauvaise utilisation des budgets ?
Si le CSE commet une erreur dans l’imputation d’une dépense sur l’un ou l’autre budget, il pourra être condamné à réintégrer les sommes utilisées à tort. L’article 314-1 du Code pénal considère la mauvaise utilisation des budgets comme un abus de confiance qui peut être puni de 5 ans d’emprisonnement et de 375 000 € d’amende.
5) Quels sont les principes applicables en matière de cotisations sociales ?
Toute somme ou avantage en nature accordé à un salarié par le CSE est soumis à cotisations sociales, sauf dans les cas suivants :
- Lorsque cette somme est versée en tant que secours ;
- Si une loi ou un décret prévoit explicitement une exonération ;
- Si elle relève d’une tolérance administrative reconnue.
Le guide pratique 2025 de l’URSSAF à destination des CSE rappelle que les prestations liées aux activités sociales et culturelles proposées par le CSE bénéficient d’une exonération de cotisations sociales. Cela inclut les activités sociales, culturelles ou de loisirs, destinées aux salariés, anciens salariés, et leurs familles.
L’Urssaf y explicite le traitement à apporter à l’utilisation de la subvention des œuvres sociales. Le tableau ci-dessous précise les montants pour 2025.
Œuvres sociales |
Cotisations |
Aide financière (services à la personne et gardes d’enfant) |
Exonération de cotisations et contributions sociales dans la limite des frais réellement engagés par le salarié et dans la limite d’un plafond annuel. Pour apprécier ce seuil, il est nécessaire de cumuler la participation du CSE et celle de l’employeur (2.540 € en 2025). |
Prime d’anniversaire de l’entreprise |
Soumis à cotisations et contributions sociales. |
Bon d’achat |
Exonération de cotisations et contributions sociales si le montant total des bons d’achat et des cadeaux en nature attribués à un salarié au cours de l’année civile ne dépasse pas 5 % du plafond mensuel de Sécurité sociale (196 € au 1er janvier 2025). Les cotisations et contributions sociales sont dues si le montant total des bons d’achat et des cadeaux en nature attribués à un salarié au cours de l’année civile dépasse 5 % du plafond mensuel de Sécurité sociale (196 € au 1er janvier 2025), sauf si 3 conditions sont remplies :
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Cantine |
Aucune cotisation et contribution sociale n’est due si la participation salariale au prix du repas est supérieure ou égale à 2,72 € (2025). Les cotisations et contributions sociales sont dues sur la valeur forfaitaire de l’avantage en nature (5,45 € en 2025) sous déduction de la participation salariale, si la participation salariale au prix du repas est inférieure à 2,72 €. |
Chèques-vacances |
Les cotisations et contributions sociales sont dues si le CSE participe à l’acquisition des chèques-vacances avec l’employeur, la participation du CSE est considérée comme un complément de rémunération. Les cotisations et contributions sociales sont exonérées si le CSE acquiert les chèques-vacances sans participation de l’employeur. |
Colonies de vacances |
Exonération de cotisations, sous réserve d’attestations d’inscriptions. |
Décès d’un membre de la famille du salarié |
Exonération de cotisations si l’aide est d’un montant inférieur ou égal à 5 % du plafond mensuel de la Sécurité sociale (soit 196 euros en 2025). Au-delà de ce montant, la preuve du secours doit être apportée, ce qui nécessite une analyse individuelle de la situation. |
Prime et bourse d’études |
Soumises à cotisations et contributions sociales. |
Prime de fête des pères et fête des mères, prime d’anniversaire, prime de naissance… |
Soumises à cotisations et contributions sociales. |
Formations, cours de langues, permis de conduire, BAFA |
Soumise à cotisations et contributions sociales. |
Prime de logement |
Soumises à cotisations et contributions sociales. |
Médaille du travail |
Exonération de cotisations et contributions sociales si la prime globale (celle du CSE et/ou celle de l’employeur) est inférieure ou égale au salaire mensuel de base du salarié. La fraction excédentaire est soumise à cotisations et contributions sociales si la prime globale est supérieure au salaire mensuel de base du salarié. Les primes versées lors de l’attribution d’une médaille d’entreprise sont soumises à cotisations et contributions sociales. |
Prévoyance |
Exonération de cotisations sociales en tant que contribution patronale s’il s’agit de contrats à caractère collectif et à adhésion obligatoire. L’exonération est limitée à la fraction n’excédant pas 6% du plafond annuel Sécurité sociale (2.826 euros pour 2025) et 1,5% de la rémunération soumise aux cotisations de Sécurité sociale sans que le total ainsi obtenu, puisse excéder 12 % du plafond annuel de la Sécurité sociale (5.652 euros pour 2025). |
Prix en nature à titre aléatoire et exceptionnel |
Exclusion des assiettes sociales. |
Prix en récompense de performances professionnelles |
Soumis à cotisations sociales. |
Prime de retraite |
Soumis aux cotisations de droit commun. Les versements échelonnés, versés après la rupture du contrat de travail, sont soumis à la cotisation d’assurance maladie, à la CSG et à la CRDS. |
Spectacles |
Exonération de cotisations et contributions sociales. |
Réduction d’abonnements ou de cotisations de pratique sportive |
Exonération de cotisations et contributions sociales. |
Titres-restaurants |
La participation du CSE à l’acquisition de titres-restaurant est exonérée de cotisations et contributions sociales si la participation globale (CSE + employeur) est comprise entre 50 et 60 % de la valeur du titre-restaurant et si cette participation ne dépasse pas 7,26 € (2025). |
Vacances |
Les participations favorisant le départ en vacances de la famille ou des enfants seuls sont exonérées de cotisations. Les primes de vacances accordées indistinctement à tous les salariés sont soumises à cotisations. |
Voyages |
Exonération de cotisations et contributions sociales. |
Les prestations proposées par le CSE doivent être accessibles à tous les salariés, sans distinction ni discrimination, comme l’a tranché la Cour de cassation dans un arrêt du 03 avril 2024. Il est interdit de différencier les bénéficiaires en fonction de critères professionnels tels que le type de contrat (CDI ou CDD), la catégorie professionnelle, le volume horaire travaillé (temps plein ou partiel) ou la présence effective dans l’entreprise.
L’ancienneté ne peut plus être utilisée comme critère pour attribuer les avantages du CSE. Ils ont jusqu’au 31 décembre 2025 pour adapter leurs pratiques et aligner leurs critères de distribution sur la réglementation. En cas de contrôle, si des conditions d’ancienneté sont encore appliquées, le CSE devra corriger sa politique pour respecter la loi.
Il est toutefois possible de moduler les montants des avantages en s’appuyant sur des critères sociaux objectifs, comme le quotient familial ou le revenu fiscal de référence. Ces critères doivent être clairs, transparents, connus de tous, et définis dans les accords ou conventions collectives. Cette modulation ne doit pas avoir pour effet d’exclure certains salariés du bénéfice des prestations.
La gestion des budgets du CSE repose sur une différenciation stricte et le respect des passerelles budgétaires légales. En optimisant l’utilisation des ressources et en anticipant les besoins, le CSE peut répondre efficacement à ses obligations économiques et sociales.
Une planification bien maîtrisée peut aussi permettre de valoriser les excédents, en favorisant des investissements durables ou des actions sociales élargies.
CE Expertises, cabinet d’expertise comptable spécialisé dans les CSE, peut vous accompagner pour les questions relevant de la gestion des budgets du CSE, et vous aider à les optimiser. Contactez-nous pour en discuter !