CGOS : quels atouts et quelle efficacité pour les salariés?

15 octobre 2024

Comment évaluer l’efficacité de ses actions dans le domaine des œuvres sociales ? Comment s’organiser au mieux pour améliorer le quotidien des salariés ? Comment intégrer ses actions en vue d’améliorer leur rémunération globale ?
Cet article prend l’exemple du CGOS pour aborder ses questions :

  • combien de salariés en bénéficient ?

  • pour quels montants moyens ?

  • qu’est-ce que cela représente dans leur rémunération globale ?

Le Comité de Gestion des Œuvres Sociales des établissements hospitaliers publics (CGOS) est une association agréée par l’État, qui assure une mission de service public de délivrance d’action sociale pour les établissements publics de santé, sociaux et médicaux sociaux de France.

Dans le cadre de son agrément ministériel, le CGOS, a pour mission de mener et développer une politique d'action sociale en faveur des agents ou retraités des établissements publics sanitaires, sociaux et médico-sociaux adhérant au CGOS et, sous certaines conditions, en faveur des membres de leurs familles.

  • Il met en œuvre des actions de solidarité, assure l’équité dans le versement des prestations, dont la majorité est ouverte à tous.
  • Il participe aux dépenses engagées par les agents ou les retraités lors de certains évènements de leur vie civile ou professionnelle (enfants, vacances, retraite…).
  • Il apporte aux agents une aide financière en cas de situation délicate (aides remboursables, aides non remboursables).
  • Il propose un ensemble de services, à des conditions favorables (billetterie, activités culturelles, sportives et de loisirs, offres Escale Vacances, Épargne chèques-vacances, chèques réduction, abonnements magazines, voitures neuves et d’occasion, renseignements juridiques).

L’État a conclu avec le CGOS le 30 mars 2000 une convention qui fixe le dispositif de contrôle et de suivi du fonctionnement et des missions du CGOS par la ministre chargée des solidarités et de la santé. Le CGOS publie chaque année un « retour d’information » qui présente ses indicateurs de suivi.

1) Le suivi classique de l’efficacité : quel est le taux d’utilisation des prestations auprès des salariés ? quel est le taux de redistribution des contributions ?

Source : Retour d’information CGOS, 2023, ensemble des établissements adhérents au CGOS, colonnes en bleu ajoutées par nos soins

Le CGOS indique le nombre d’agents en activité ayant perçu au moins une prestation ou action du CGOS, ce qui lui permet de calculer un taux d’impact. Ce taux est calculé par rapport à l’effectif total des établissements au 31 décembre.

On pourra constater que tous les agents n’utilisent pas les services du CGOS, plus d’un tiers n’y recourt pas. Il serait utile de comprendre pourquoi (manque d’informations ? absence de besoin ou d’intérêt ? etc.) et de calibrer des actions pour viser un taux plus élevé (en 2023, le taux était redescendu par rapport à 2022), en repartant des besoins des salariés. Le CGOS semble travailler sur la simplification de l’accès pour les agents. L’objectif est d’arriver à ce que tout nouvel agent puisse, dès son arrivée, avoir automatiquement un accès au CGOS.

Le financement de cette action sociale est assuré par une contribution des établissements adhérents au CGOS, dont le taux est fixé par le ministère de tutelle.Par rapport à ses ressources collectées, le CGOS détaille le montant de ces redistributions (hors aides remboursables). Si en 2022 le taux était excellent, il s’est nettement dégradé en 2023 (84%). Il conviendrait de comprendre également les raisons de cette baisse qui conduit à un écart de 84 M€ entre les ressources et les dépenses.

Lors de l’inspection de la Cour des Comptes en 2018, le référé rendu public pointait que le CGOS accumulait des fonds propres (avec des reports à nouveaux et des réserves non utilisées) qui au cumul entre 2012-2016 représentaient un total de 20,2% des contributions de la même période. La Cour en déduisait que l’on pourrait réduire le taux de contribution des établissements au CGOS, sans mettre en danger ses capitaux propres et ainsi générer de l’ordre de 200 M€ d’économies. C’est le danger classique qui guette les instances qui n’utilisent pas les ressources qui sont mises à leur disposition. Les financeurs sont susceptibles de vouloir baisser leur contribution !

Le rapport de la Cour des Comptes en déduisait ainsi : « La Cour a constaté des défaillances dans le contrôle par l’État de l’action sociale hospitalière conduite par le CGOS. Le ministère n’a pas utilisé les outils de surveillance prévus par la convention. Il n’a pas davantage examiné le bon usage des contributions, ni pris position sur le niveau élevé des fonds propres. Enfin, il n’a pris aucune initiative pour faire mettre en conformité le champ de l’action sociale du CGOS avec la loi » (page 5 du rapport).

2) Le suivi plus approfondi du CGOS : quel est le nombre de bénéficiaire exact par prestations et actions ?

Le « retour d’information » du CGOS donne des détails plus complets sur le nombre d’agents servis et le nombre de bénéficiaires, détaillé dans le tableau ci-dessous.


Source : Retour d’information CGOS, 2023, ensemble des établissements adhérents au CGOS, colonnes en bleu ajoutées par nos soins

Concernant les dépenses d’action sociale, l’Aide sociale aux agents en situation de maladie a représenté près d’un tiers du budget de l’année, avec près de 140 M€ versés (ce qui représente 1838 €/bénéficiaires). Après plusieurs années d’augmentation, ce budget se tasserait pour la première fois en 2023.Le CGOS verse en effet une « prestation maladie » compensant partiellement la perte de rémunération en cas d’incapacité temporaire de travail prolongée (hors contrats de courte durée). La prestation maladie du CGOS, calculée en fonction du traitement indiciaire, intervient dans les cas où le fonctionnaire est statutairement payé à demi-traitement, dans la limite de 150 jours pour un congé de maladie ordinaire (CMO) et de 150 jours par an pendant deux ans pour les congés plus longs (CLM ou CLD). Pour les agents contractuels, la durée d’indemnisation est plus courte.

Cette prestation a été particulièrement attaqué par la Cour des Comptes dans son délibéré de 2018 déjà cité. L'inspection générale des Affaires sociales (IGAS) notait déjà en 2019 que cette prestation était en rapide croissance, ce qui mettrait en « existence en cause ». Son rapport sur la protection sociale complémentaire des agents publics (rapport spécifique à la fonction publique hospitalière) note cependant que :

  • « Cette croissance fait écho à l’augmentation de l’absentéisme pour cause de maladie, qui connaît une progression lente mais continue, notamment pour le personnel non médical (de 5,66 % en 2012 à 7,09 % en 2017) » ;
  • « La durée moyenne de versement atteint 81 jours en CMO, soit un peu plus de la moitié de la durée maximale annuelle, ce qui ne permet pas de corroborer les indications de certaines DRH sur l’effet désincitatif à la reprise du travail qu’aurait la prestation » ;
  • « Les établissements interrogés considèrent généralement que cette prestation est nécessaire. Toutefois cette appréciation globale positive peut s’accompagner de critiques - notamment sur ses lacunes, en termes de niveau garanti (ne prenant pas en compte les primes), de durée de service ou de population couverte (excluant les personnels médicaux). » (Caractères gras ajoutés par nous).

Deuxième poste de dépenses, les prestations Études-éducation-formation permettent aux agents à revenus modestes de financer la scolarité de leurs enfants.

Un dispositif « Prestation annuelle retraite » concerne peu de bénéficiaires (35) mais pour une enveloppe de 3,1 M€. Il s’agit d’un dispositif calibré pour aider les retraités les plus modestes, grâce à une prestation régionale spécifique

Un dispositif peu couteux permet de toucher un grand nombre de bénéficiaires : afin d’accompagner les établissements dans leurs projets collectifs, 0,2 M€ d’aides aux actions sociales collectives ont été versés dans les régions proposant cette prestation.

3) La mise en place d’actions sur l’organisation interne du CGOS : comment mieux servir les salariés ?

Le CGOS a été profondément impacté par le rapport de la Cour des comptes publié début 2018 qui a induit une menace sur son modèle économique, notamment avec la remise en cause de la légitimité des prestations maladie et de départ à la retraite. La loi de transformation de la fonction publique du 19 août 2019 a renforcé encore cette inquiétude, notamment sur le volet protection sociale complémentaire qui a fait l’objet d’un rapport de trois corps d’inspection.

Le CGOS a réagi en lançant un projet d’entreprise intitulé « Construisons notre avenir » qui a été présenté en 2018 aux salariés (En 2020, le CGOS comptait environ 280 salariés répartis sur 12 délégations régionales, réparties sur 16 sites et au siège à Paris). Dans ce projet, il s’agissait de déployer une organisation interne au service d’une stratégie externe « ambitieuse » avec 3 cibles, les agents hospitaliers clients, les établissements contributeurs et employeurs, l’organisation interne et les salariés du CGOS.

Ces actions ont induit une refonte des systèmes d'information, des organisations, des rôles, responsabilités, des compétences et des accords sociaux. Nous noterons surtout la volonté de miser sur une transformation digitale avec notamment :

  • La mise en place d’un outil de relation client (C.R.M) ;
  • Un changement d’outil comptable et budgétaire (solution Cloud Accounting System);
  • Un outil statistique de type Business Intelligence, très lié au C.R.M, en cours de déploiement ;
  • Un outil de communication Multicanal est implanté ;
  • Une partie RGPD, avec la maîtrise et le contrôle de flux d’informations concernant potentiellement près de 1.4 millions d’agents et 2 300 établissements.

Cette évolution va dans le sens de ce que nous pouvons voir à l’œuvre dans les CSE car les outils digitaux permettent d’automatiser et d’améliorer la relation directe avec les salariés.

Selon le président de l’association, le CGOS est « très performant », avec un budget de fonctionnement inférieur à 7 %.

4) Comment intégrer ses actions dans le cadre d’une réflexion sur la rémunération globale des salariés ?

L’Insee communique des données sur les salaires de la Fonction Publique Hospitalière. Selon ses définitions :

  • Le salaire en équivalent temps plein (EQTP) est un salaire converti à un temps plein pendant toute l’année, quel que soit le volume de travail effectif. Par exemple, pour un agent ayant occupé un poste de travail durant six mois à 80 % et ayant perçu au total 10 000 euros, le salaire en EQTP est de 10 000/(0,5 × 0,8) = 25 000 euros par an.
  • Le salaire net (de prélèvements sociaux) est le salaire que perçoit effectivement le salarié avant prélèvement de l’impôt sur le revenu. Il s’obtient en retranchant du salaire brut les cotisations sociales salariales, la contribution sociale généralisée (CSG) et la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS).

Le tableau ci-dessous détaille les salaires nets moyens pour les différentes catégories de personnel issu de la dernière étude de l’Insee qui porte sur l’année 2022.


Source : Les salaires dans la fonction publique hospitalière en 2022, Insee Première, N°2015, Septembre 2024.

En 2022, un agent de la fonction publique hospitalière (FPH) perçoit en moyenne 2 734 euros net par mois en équivalent temps plein ; cette moyenne prend en compte tous les salariés des hôpitaux et des établissements médico-sociaux publics de la Fonction Publique Hospitalière, qu’ils soient fonctionnaires, contractuels ou personnels médicaux.

Cette analyse donne une vision précise des salaires mais pas de la rémunération globale. Le tableau ci-dessous détaille les différentes formes de rémunération possible.

Dans le cas des agents de la fonction publique hospitalière, on peut facilement comprendre pourquoi le CGOS a mis en place une aide sociale aux agents en situation de maladie. En effet, les salariés ne semblent pas bien couverts par rapport aux aléas de la maladie sur plusieurs aspects. De plus, alors que les complémentaires santé sont obligatoires dans les entreprises privées et les associations, les agents hospitaliers bénéficient d'un dispositif spécifique qui leur permet de bénéficier de soins gratuits dispensés dans l'établissement où ils travaillent, ainsi que de produits pharmaceutiques que leur délivrent les pharmacies de ces établissements.

La portée effective de ce dispositif est néanmoins "très inégale selon les établissements", selon le rapport de l’Igas, déjà cité, consacré à la complémentaire santé dans l’hôpital. Surtout, pour ce service d'inspection, ces dispositifs sont "loin de répondre aux besoins des agents hospitaliers qui recourent donc largement à l'assurance complémentaire", ce qui impacte bien évidemment leur budget.

La Direction générale de l'Offre de soins (DGOS) a annoncé début mai2024 que ce dispositif de "soins gratuits" devrait être maintenu dans le cadre de la réforme de la complémentaire santé. Lors de son audition par le Sénat, le représentant de la DGOS a néanmoins évoqué une possible évolution des "soins gratuits", dont le nombre de bénéficiaires reste encore difficile à estimer : selon lui, "Nous nous efforçons de travailler sur une complémentaire santé qui puisse venir couvrir la totalité des soins puisque le dispositif des soins gratuits ne permet pas aux agents de bénéficier de l'ensemble du panier de soins minimal défini par le code de la Sécurité sociale". À titre d'exemple, l'optique et les prothèses auditives ne sont pas prises en charge parles établissements de santé dans le cadre des "soins gratuits".

Le représentant de la DGOS a précisé que l'administration envisageait de s'orienter vers "la mise en place d'une complémentaire santé unique sur l'ensemble du territoire "pour les agents hospitaliers. "Il faut faire en sorte que tous les agents de l'hospitalière bénéficient d'un panier de soins au même prix et avec les mêmes garanties "afin, notamment, "d'éviter une forme de concurrence entre les établissements de santé. Et ce d'autant plus à l'heure où ces établissements rencontrent de nombreuses difficultés en termes d'attractivité et de fidélisation ».(Caractères gras ajoutés par nous).

Ces éléments périphériques de rémunération sont en effet de plus en plus pris en compte par les salariés. Alors que le secteur hospitalier est très malmené (difficultés de recrutement et de rétention du personnel, conditions de travail dégradées, etc.), il est frappant de constater que l’État ne cherche pas à proposer des éléments de rémunérations périphériques.

Le cas du CGOS nous semble assez typique des situations où les instances chargées de la gestion des œuvres sociales sont obligées de mettre en place des dispositifs de secours pour faire face aux situations les plus préoccupantes.

CE Expertises, cabinet d’expertise comptable spécialiste du CSE, peut vous accompagner pour faire le point sur la mise en place d’indicateurs de suivi de vos actions dans le domaine des œuvres sociales et sur l’optimisation de l’organisation interne pour les mettre en œuvre le plus efficacement possible. Contactez-nous pour en discuter !

Pour aller plus loin :