Congé de mobilité Entreprise : Tout savoir en 10 questions

22 mai 2024

Le congé de mobilité était initialement prévu par le Code du travail pour favoriser les reconversions professionnelles, en mesure d’accompagnement d’un plan de licenciement pour les entreprises de plus de 1000 salariés.

Son champ d’application et son objet ont été élargis par une ordonnance de 2017. Le congé de mobilité est désormais accessible à toutes les entreprises, dès lors qu’elles cherchent à réduire leurs effectifs, même en l’absence de projet de licenciement économique. Cet article, en dix questions essentielles, reprend les points clés et les éléments de négociation pour les organisations syndicales représentatives et le CSE.

1) Quel est l’objectif du congé de mobilité ?

Dans le Code du travail, le congé de mobilité se situe dans la section « rupture d’un commun accord dans le cadre d’un accord collectif », avec le même objectif que la rupture conventionnelle collective, bien qu’il soit plus souple.

L’objectif du congé de mobilité est de mettre en place un plan de réduction des effectifs, même en l’absence d’une procédure de licenciement, sans recherche de reclassement interne ni justification économique.
Il a été conçu pour permettre aux entreprises d’anticiper les mutations technologiques et de « sécuriser les transitions professionnelles » en offrant la possibilité aux salariés de s’inscrire « volontairement » dans une démarche de « mobilité », avec un accompagnement vers le retour à l’emploi par des mesures spécifiques, des actions de formation et des périodes de travail.

Le congé de mobilité permet par exemple d’organiser des mobilités internes au sein d’un Groupe, ou externes pour accompagner des salariés vers un nouveau projet professionnel, à leur demande ou à l’initiative de l’entreprise.

2) Quelles sont les entreprises concernées par le congé de mobilité ?

Auparavant réservé aux entreprises de plus de 1000 salariés, le champ d’application du congé de mobilité est désormais élargi :

3) Quelles sont les modalités de mise en œuvre du congé de mobilité dans l’entreprise ?

Le congé de mobilité peut donc être mis en place dans 2 situations :

Il n’est alors pas soumis à la validation de la DREETS. Une information a posteriori sur la situation des salariés à l’issue du congé de mobilité, ainsi que le nombre de ruptures de contrat de travail est suffisante.

L’accord de RCC devra lui être validé par la DREETS.

Le Code du travail prévoit les thématiques que les parties sont tenues de négocier. Cette liste est impérative mais n’est pas exhaustive, des mesures supplémentaires peuvent être prévues.

L’accord collectif de GEPP ou de RCC doit à minima définir :

  • la durée du congé de mobilité
  • les conditions que le salarié doit remplir pour en bénéficier
  • les modalités d’adhésion au congé de mobilité
  • l’organisation de l’accompagnement et des périodes de travail
  • la rémunération versée pendant la période du congé
  • les conditions de rupture du congé
  • les indemnités de rupture du contrat de travail à la fin de la période du congé
  • les conditions d’information des instances représentatives du personnel.

4) Quelle est la durée du congé de mobilité ?

Le congé de mobilité n’a pas de durée minimale ou maximale définie par la loi. C’est l’accord de GEPP ou de RCC qui détermine sa durée.
Toutefois, il faut noter que l’exonération de cotisations sociales ne s’applique que sur les 12 premiers mois du congé de mobilité.

Nous avons participé à la négociation de dispositif qui peuvent prévoir des durées plus longues pour certaines populations, par exemple :

  • 15 mois maximum pour les salariés dits fragilisés de + de 50 ans ou salarié « parent isolé » ou en situation de maladie professionnelle,
  • 20 mois maximum pour les salariés âgés de plus de 55 ans compte tenu de leur situation au regard du marché de l’emploi, ou pour les salariés reconnus travailleurs handicapés (RQTH) ou ayant un conjoint ou un enfant en situation de handicap ;
  • 24 mois maximum en cas de formation de reconversion, après avis du cabinet d’accompagnement attestant de la pertinence du cursus de formation avec le projet professionnel du salarié et sur décision de la commission GEPP au titre de son rôle renforcé.

5) Quelles sont les conditions d’accès au congé de mobilité ?

L’accord doit fixer les conditions à remplir pour avoir droit au congé. Ce dernier peut concerner tous les salariés mais peut aussi se limiter aux bénéficiaires de certaines catégories professionnelles, ou à une ancienneté minimum.
Les critères ne doivent pas être discriminatoires.

6) Quelles sont les conditions d’adhésion au congé de mobilité ?

L’accord GEPP détermine qui prend l’initiative du congé : l’employeur, le salarié, ou indifféremment.
Il prévoit le délai dans lequel une réponse doit être apportée à la proposition ou à la demande.

Il n’y a aucune obligation d’accepter le congé de mobilité.

Le refus du salarié ne pourra pas être sanctionné. L’employeur peut également refuser la demande d’un salarié qui ne remplirait pas les critères d’adhésion.

7) Quelle est la rémunération pendant un congé de mobilité ?

Pendant la période du congé de mobilité qui correspond à la durée du préavis de licenciement, le salarié perçoit sa rémunération habituelle, soumise aux cotisations sociales et de retraite, et à l’impôt sur le revenu.

Une fois la période correspondant au préavis effectué, la rémunération du salarié en congé de mobilité doit être au moins égale à 65% de la rémunération brute moyenne des 12 mois précédant la date de début du congé, sans pouvoir être inférieure à 85% du SMIC.

Pour les 12 premiers mois du congé (24 mois en cas de formation pour reconversion professionnelle), la rémunération est exonérée de cotisations et contributions sociales. Elle est seulement soumise à CSG (0,5%) et CRDS (6,2% dont 3,8% déductibles) dues sur les revenus de remplacement, après abattement de 3%. Comme pour tout revenu de remplacement, il peut y avoir exonération de CSG et CRDS en cas de faibles revenus.

Ainsi, sans charges sociales, si la rémunération est négociée par un exemple à un taux de 80% de la rémunération moyenne des 12 derniers mois, le salarié peut percevoir un montant quasi équivalent au montant net précédemment perçu.

Pendant les périodes d’emploi prévues par le congé de mobilité, le salarié perçoit la rémunération correspondant au travail qu’il effectue. Toutefois, si cette rémunération est inférieure à celle perçue pendant le congé de mobilité, l’accord GEPP peut prévoir le versement d’un complément par l’employeur initial.

Pour l’assurance vieillesse et la retraite complémentaire, les 9 premiers mois du congé de mobilité sont validés sur la base des taux obligatoires AGIRC-ARRCO.
Au-delà des 9 mois, c’est l’accord qui doit fixer le régime de couverture. Il est également possible de négocier que le paiement des cotisations AGIRC-ARRCO par l’employeur se fasse sur un salaire fictif rétabli à 100%, pour garantir aux salariés l’acquisition de droits à la retraite complémentaire comme si ils avaient poursuivis leur activité dans des conditions normales.

Concernant la couverture sociale et complémentaire frais de santé et prévoyance, les salariés conservent le bénéfice du régime applicable aux salariés non bénéficiaires du congé de mobilité, pendant toute la durée du congé.

A l’issue du congé de mobilité, si le salarié n’a pas retrouvé d’emploi, il pourra bénéficier de l’assurance chômage dans les conditions de droit commun, la rupture étant dans tous les cas considérée comme à l’initiative de l’employeur.
Pour le calcul des droits, la période correspondant au congé de mobilité est neutralisée, à l’exception des périodes de travail.

Période

Rémunération

Cotisations sociales et fiscales

Retraites

Prévoyance et Mutuelle

Période du congé de mobilité qui correspond à la durée du préavis de licenciement Rémunération habituelle Cotisations sociales et fiscales similaires à celles appliquées à la rémunération habituelle Les 9 premiers mois du congé sont validés sur la base des taux obligatoires AGIRC-ARRCO.
Au-delà de 9 mois, l’accord doit fixer le régime de couverture.
Les salariés conservent le bénéfice du régime applicable aux salariés non bénéficiaires du congé, pendant toute la durée du congé de mobilité.
Une fois la période correspondant au préavis effectuée Rémunération au moins égale à 65% de la rémunération brute moyenne des 12 derniers mois, sans être inférieure à 85% du SMIC Pour les 12 premiers mois du congé : exonération de cotisations sociales et fiscales, à l’exception de la CSG et CRDS

8) Quelles sont les modalités de rupture du contrat de travail en cas de congé de mobilité ?

L’acceptation du congé de mobilité par le salarié entraîne la rupture de son contrat de travail, au terme du congé.
Pendant toute la durée du congé, le salarié reste lié à l’entreprise par le contrat de travail. Cependant, le contrat est suspendu lorsque le salarié effectue des périodes de travail en dehors de l’entreprise. Ces périodes d’emploi peuvent être effectuées dans le cadre d’un CDD ou d’un CDI :

  • en cas de CDD, le congé de mobilité est suspendu pour la durée de celui-ci et reprend ensuite.
  • en cas de CDI, l’accord GEPP pourra fixer la fin du congé de mobilité au terme d’une période d’essai concluante. Dans le cas contraire, le congé de mobilité pourra reprendre.

Au terme du congé de mobilité, le salarié qui y a adhéré accepte la rupture de son contrat de travail d’un commun accord avec l’employeur.

En cas de non-respect des engagements du salarié ou d’abandon du dispositif, le congé de mobilité pourra également être rompu avant son terme.

9) Quelles sont les indemnités de rupture de contrat après un congé de mobilité ?

Au terme du congé de mobilité, le salarié perçoit l’indemnité de rupture définie par l’accord. Cette indemnité ne peut être inférieure à l’indemnité légale de licenciement (c’est le minimum prévu par le code du travail). Il s’agit d’un élément clé à négocier : certains accords prévoient des montants fixes supérieurs aux indemnités légales (exemple 20.000 euros) ou des systèmes valorisant l’ancienneté avec des plafonds (exemple 50 mois de salaires).

L’indemnité de rupture est exonérée de cotisations sociales dans la limite de 2 fois le Plafond Annuel de la Sécurité Sociale (PASS) soit 92 736 € en 2024. Elle est également exonérée d’impôt sur le revenu. Elle est uniquement soumise à CSG et CRDS, au-delà de l’équivalent de l’indemnité légale de licenciement.
Son régime social et fiscal est donc très intéressant pour les salariés.

10) Quel est le rôle du CSE dans le cadre du congé de mobilité en entreprise ?

Le CSE doit obligatoirement recevoir l’information du congé de mobilité :

Différents points du congé de mobilité peuvent être négociés par les organisations syndicales représentatives. En voici une liste non exhaustive.

Points de la négociation

Axes de négociation pour les organisations syndicales représentatives et le CSE

Cabinet d’accompagnement Les organisations syndicales et le CSE peuvent demander à participer au choix du cabinet retenu pour accompagner les salariés dans leurs démarches.
Organismes de formation Le choix des organismes de formation ou le type de formations offertes peuvent être négociées.
Durée du congé La loi ne fixant pas de durée minimale ou maximale, le CSE peut négocier la durée du congé de mobilité, tout en sachant que l’exonération des cotisations sociales et patronales ne s’applique que sur les 12 premiers mois.

Une durée différente peut être prévue pour des salariés d’un secteur spécifique ou d’une catégorie professionnelle particulièrement impactée par les évolutions technologiques par exemple.

Montant de la rémunération Les organisations syndicales peuvent négocier un taux plus élevé que celui prévu de 65 % du salaire antérieur, pour compenser au maximum la perte de salaire.
A hauteur de 80% du salaire antérieur, avec l’exonération des cotisations, le salarié aura quasiment l’équivalent de son ancien salaire net.
Régime de retraite Le CSE peut négocier une couverture AGIRC-ARRCO au-delà de 9 mois.
Clause de substitution L’accord peut prévoir qu’un collaborateur non concerné par les critères d’adhésion peut, sous certaines conditions, laisser son poste à un collaborateur concerné et ainsi prendre le congé de mobilité à sa place.
Prime de mobilité rapide En cas de signature d’un CDI avec période d’essai concluante avant la fin du congé de mobilité, les organisations syndicales et le CSE peuvent négocier le versement d’une prime au salarié correspondant à tout ou partie de la période du congé de mobilité non effectuée.

Le CSE doit aussi être vigilant à ce que les ruptures conventionnelles collectives et le congé de mobilité ne constituent pas une fraude au PSE, selon l’effectif de l’entreprise, pour éviter les indemnisations liées à la mise en place obligatoire du congé de sécurisation professionnelle ou du congé de reclassement.

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