Les heures supplémentaires concernent de nombreuses entreprises et salariés. Définies comme les heures de travail réalisées au-delà de la durée légale hebdomadaire, elles sont strictement encadrées par le Code du travail pour garantir les droits des salariés tout en répondant aux besoins des employeurs.
Les heures supplémentaires ne se résument pas à des heures travaillées en plus ; elles impliquent des obligations pour les employeurs, que ce soit en matière de paiement, de respect des contingents ou de consultation des représentants du personnel.
Dans cet article, nous détaillerons le cadre légal des heures supplémentaires, les différentes modalités de calcul, les exceptions applicables à certains salariés, et les obligations relatives à leur rémunération ou à leur compensation en repos. Nous aborderons également les régimes d’exonération et le rôle essentiel du CSE dans leur organisation.
1) Quel est le cadre légal des heures supplémentaires ?
Les heures supplémentaires sont définies comme les heures travaillées au-delà de la durée légale du travail. La durée légale du travail des salariés à temps complet est fixée à 35 heures hebdomadaires, en vertu de l’article L3121-27 du Code du travail.
Cela ne signifie pas qu'il n'est pas possible de faire travailler un salarié plus de 35 heures par semaine, mais seulement qu'au-delà de cette durée, sans dispositions conventionnelles ou d’entreprises contraires, il faudra payer une majoration de salaire ou une majoration du temps de repos, pour chaque heure réalisée en sus.
Seules les heures de travail effectif sont prises en compte, ce qui exclut les périodes non travaillées : contreparties obligatoires en repos ou repos compensateur de remplacement, jours de RTT, périodes de congé, périodes de maladie même rémunérées, jours fériés chômés (article L3121-30 al.2 du Code du travail).
Pour les congés payés, le droit européen les prend en compte pour le calcul des heures supplémentaires (CJUE 13/01/2022, aff. 514/20). Le juge français pourrait s’aligner sur cette position à l’avenir.
Les heures supplémentaires sont décomptées :
- Sur la semaine civile qui commence le lundi à minuit et se termine le dimanche à minuit (article L312135 du Code du travail) ;
- Sur une période de 7 jours consécutifs fixée par négociation collective ;
Si un dispositif d'aménagement du temps de travail sur une période de référence supérieure à la semaine est mis en place dans l'entreprise par accord d’entreprise, les heures supplémentaires sont décomptées à l'issue de cette période (articles L3121-41 et L3121-44 du Code du travail) :
- Si la période de référence est annuelle, les heures supplémentaires sont celles effectuées au-delà de 1 607 heures ; si la période de référence est inférieure ou supérieure à un an, les heures supplémentaires sont celles effectuées au-delà d'une durée hebdomadaire moyenne de 35h calculée sur la période de référence ;
Si le contrat de travail mentionne une convention de forfait, il faut se reporter à celle-ci pour connaître les règles de décompte des heures supplémentaires.
La limitation légale fixe un plafond de 220 heures supplémentaires par an par salarié, sauf disposition plus favorable prévue par une convention collective, ou contingent négocié par accord d’entreprise.
Les heures supplémentaires effectuées au-delà du contingent annuel ouvrent droit à une contrepartie obligatoire en repos.
2) Tous les salariés sont-ils concernés par les heures supplémentaires ?
Tous les salariés peuvent effectuer des heures au-delà de la durée légale, à l’exception des salariés bénéficiant d'un régime spécifique excluant les heures supplémentaires :
- Cadres en forfait jours ;
- Salariés à temps partiels (on parle alors d’heures complémentaires) ;
- Cadres dirigeants.
3) Toutes les heures effectuées au-delà de la durée légale du travail sont-elles forcément des heures supplémentaires ?
Toute heure accomplie au-delà de 35 heures ne doit pas automatiquement être qualifiée d'heure supplémentaire. Pour répondre à la qualification d'heures supplémentaires, l'exécution de la prestation de travail du salarié :
- Doit faire suite à une demande implicite ou explicite de l'employeur (Cour de cassation, 20/03/1980, n° 78-40.979 ; 02/11/2026, n° 15-20.540) ;
- Ou doit avoir été rendue nécessaire par les tâches qui ont été confiées au salarié (Cour de cassation, 14/11/2018, n° 17-16.959).
Si le salarié peut travailler au-delà de la durée légale du travail, il doit tout de même respecter les durées maximales. Le salarié ne peut pas travailler plus de :
- 10 heures par jour (sauf dérogations) ;
- 48 heures sur une semaine ;
- Ou 44 heures en moyenne sur 12 semaines ;
- Ou 46 heures, seulement si prévu par une convention ou un accord d'entreprise ou de branche.
En cas de circonstances exceptionnelles et sur autorisation de l'autorité administrative, l'employeur peut demander à ses salariés de travailler jusqu'à 60 heures par semaine.
Le CSE doit alors donner son avis, qui sera transmis à l’inspection du travail.
4) Les salariés peuvent-ils refuser d’effectuer des heures supplémentaires ?
Le salarié ne peut refuser, sans motif légitime, d'accomplir des heures supplémentaires. Le refus constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement, pouvant aller jusqu’à la faute grave (Cour de cassation, 26/11/2003, n° 01-43.140).
5) Paiement des heures supplémentaires ou récupération : quelle option ?
Le remplacement de tout ou partie du paiement des heures supplémentaires et des majorations s'y rapportant par un repos compensateur équivalent peut être prévu :
- Par convention ou accord collectif d'entreprise ou de branche ;
- Dans les entreprises dépourvues de délégué syndical, par décision de l'employeur, sous réserve que le CSE ne s'y soit pas opposé.
Les heures supplémentaires compensées intégralement par un repos (attribution d'un repos équivalent à leur paiement et aux majorations afférentes) ne s'imputent pas sur le contingent annuel d'heures supplémentaires.
La contrepartie obligatoire en repos est due pour toute heure supplémentaire accomplie au-delà du contingent annuel aux salariés concernés par celui-ci.
Elle s'ajoute à la rémunération des heures au taux majoré ou au repos compensateur de remplacement.
6) Comment les heures supplémentaires sont-elles rémunérées ?
Les heures effectuées au-delà de 35 heures sont considérées comme supplémentaires. Par exemple, un salarié travaillant 39 heures par semaine réalise 4 heures supplémentaires.
Toutefois, lorsque la durée collective de travail conventionnelle est inférieure à 35 heures par semaine, les heures supplémentaires sont décomptées à partir de la 35ème heure seulement, sauf dispositions légales ou conventionnelles contraires. Par conséquent, les heures effectuées au-delà de la durée conventionnelle fixée et jusqu'à hauteur de la durée légale de 35 heures ne sont pas des heures supplémentaires.
Les heures supplémentaires sont rémunérées avec une majoration prévue par le Code du travail :
- +25 % pour les 8 premières heures supplémentaires (de la 36e à la 43e heure).
- +50 % pour les heures au-delà (à partir de la 44e heure).
Certaines conventions collectives peuvent prévoir des majorations différentes, mais elles doivent toujours être au moins égales au minimum légal.
Un accord collectif d'entreprise ou de branche peut aussi fixer le taux de majoration des heures supplémentaires. Ce taux ne peut toutefois pas être inférieur à 10 % (Article L3121-33 du Code du travail).
Les majorations pour heures supplémentaires peuvent être cumulées avec les majorations conventionnelles prévues au titre des heures effectuées la nuit, le dimanche ou les jours fériés.
L'employeur peut aussi accorder un repos compensateur équivalent à la majoration due. Exemple : 4 heures supplémentaires majorées à 25 % donnent droit à 5 heures de repos.
Base de calcul :
- Salaire brut horaire
- Primes liées au travail effectif (astreinte, travail de nuit, dimanche et jours fériés, danger, assiduité, avantages en nature…) ;
- Exclusion des primes indépendantes du travail fourni (ancienneté, paniers, frais professionnels…).
L'employeur verse les heures supplémentaires sur la fiche de paie. Il doit mentionner la période et le nombre d'heures de travail auxquels se rapporte le salaire, en distinguant :
- Les heures payées au taux normal ;
- Et les heures qui comportent une majoration pour heures supplémentaires (en mentionnant le ou les taux appliqués pour ces heures).
Les heures supplémentaires sont soumises aux cotisations sociales, bien que des exonérations sont possibles.
7) Quelles sont les règles en matière d’exonérations et d’imposition des heures supplémentaires ?
Depuis la loi TEPA et ses modifications ultérieures, les heures supplémentaires bénéficient d'un régime favorable.
Exonération fiscale :
- Les heures supplémentaires sont exonérées d'impôt sur le revenu dans la limite de 7 500 € par an (au lieu de 5 000 € avant 2022). Ainsi, seules les heures supplémentaires effectuées au-delà de ce plafond sont soumises à l'impôt ;
- Les heures complémentaires pour les salariés à temps partiel bénéficient des mêmes avantages.
Réduction des cotisations sociales :
- Pour les salariés : cotisations salariales d’assurance vieillesse de base et complémentaire, dans la limite de 11,31 %.
- Pour les employeurs : applicables aux entreprises de moins de 20 salariés, étendues aux entreprises de 20 à 249 salariés. Déduction sur les cotisations dues au titre de l'ensemble de la rémunération versée au salarié au moment du paiement de la durée de travail supplémentaire (et non sur les seules cotisations relatives à la majoration de salaire).
8) Quel est le rôle du CSE en matière d’heures supplémentaires ?
Dans les entreprises de plus de 50 salariés, le CSE doit être informé et consulté régulièrement sur l’organisation des heures supplémentaires, selon qu'elles sont effectuées ou non à l'intérieur du contingent annuel d'heures supplémentaires (article L3121-33 al. 5 et 6 du Code du travail).
Au-delà du contingent, une contrepartie obligatoire en repos est prévue :
- 50% du temps travaillé pour les entreprises de moins de 20 salariés ;
- 100% du temps travaillé pour les entreprises à partir de 21 salariés.
Lorsque le contingent annuel d'heures supplémentaires n'est pas fixé par une convention ou un accord collectif, les modalités de son utilisation et de son dépassement figurent dans la BDESE (article L2312-26 du Code du travail) et donnent lieu au moins une fois par an à une consultation du CSE (article L3121-40 du Code du travail).
À défaut de détermination du contingent par voie conventionnelle, les modalités de son utilisation et de son éventuel dépassement donnent lieu au moins une fois par an à une consultation du CSE. Celle-ci doit porter sur la programmation de l'utilisation des heures supplémentaires au cours de la période de référence couverte par le contingent et doit donc avoir lieu avant le 31 décembre d'une année pour l'année suivante si l'année civile est retenue comme période de référence.
Dans le cadre de sa mission de suivi du respect des conditions de santé et de sécurité, le CSE s’assure que le volume d'heures supplémentaires n'affecte pas la santé des salariés.
La mise en œuvre d’heures supplémentaires nécessite un suivi rigoureux des règles légales, des procédures internes et des avantages fiscaux pour éviter tout risque contentieux.
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