PSE

Les licenciements économiques de 10 salariés et plus sur une même période de 30 jours imposent à l’employeur de suivre une procédure très cadrée, qui implique notamment, une information et consultation spécifiques des représentants du personnel ainsi que l’établissement d’un Plan de Sauvegarde de l’emploi (PSE) dans les entreprises d’au moins 50 salariés.

Ces procédures de licenciement économique ont été modifiées par la loi de sécurisation de l’emploi du 14 juin 2013. Désormais, la procédure d’information et de consultation du comité sur le projet de licenciement économique est simplifiée et enfermée dans des délais fixés en fonction du nombre de licenciements projetés. Le PSE peut prendre la forme soit d’un accord collectif, conclu à une majorité qualifiée, soit d’un document unilatéral de l’employeur, validé ou homologué par la Directte. Le rôle de l’administration est renforcé. Il ne s’agit plus d’un simple contrôle de la régularité de la procédure. Ses pouvoirs et la portée de son contrôle ont été renforcés par le législateur de sorte qu’elle devient un interlocuteur incontournable pour les deux parties.

 

Quelle est la différence entre un document unilatéral et un accord dans un PSE ?

La négociation d’un accord PSE n’a rien d’obligatoire. A défaut d’accord (absence ou échec des négociations), l’employeur peut élaborer unilatéralement un document qui fixe le contenu du PSE. Ce document est élaboré après la deuxième réunion du comité. La conclusion d’un accord majoritaire demeure possible à tout moment de la procédure, sur tout ou partie du projet de licenciement et du plan social.

Le document unilatéral doit préciser :

  • Le contenu du PSE
  • Les modalités d’information et de consultation du Comité
  • La pondération et le périmètre d’application des critères d’ordre des licenciements
  • Le calendrier des licenciements
  • Le nombre de suppressions d’emploi et les catégories professionnelles concernées
  • Les modalités de mise en œuvre des mesures d’adaptation et de reclassement

Le tableau ci-dessous précise les différences entre les deux façons d’aborder un PSE (ainsi que la voie intermédiaire qui mêle accord et document unilatéral).

Principe général Le PSE et la procédure doivent faire l'objet d'un accord collectif ou d'un document unilatéral de l'employeur ou d'une combinaison des 2 formules.
Voies possibles Accord majoritaire avec les organisations syndicales représentatives
articles L.1233-24-1 à L.1233-24-3 code du travail
Document unilatéral élaboré par l'employeur
article L.1233-24-4 code du travail
Négociation en vue de parvenir à un accord majoritaire Dans les entreprises d'au moins 50 salariés, un accord collectif peut déterminer le contenu du PSE, ainsi que les modalités de consultation du CSE et de mise en œuvre des licenciements.

L'accord peut être négocié et conclu au niveau de l'entreprise ou, le cas échéant, de l'unité économique et sociale.

À défaut d'accord collectif, l'employeur détermine "seul" le contenu du PSE après consultation du CSE, puis établit, après la dernière réunion du comité, un document en reprenant le contenu et précisant les éléments indispensables.

Attention, si la négociation d'un accord a échoué, le document unilatéral ne reprend pas nécessairement les mesures précédemment proposées dans le cadre des négociations. Cet argument fait souvent l'objet d'un "chantage" lorsque les négociations n'avancent pas sur certains sujets:  menace de l'employeur de s'en tenir à des mesures moins favorables présentées dans un document unilatéral.

Contrairement à l'accord, il ne peut déroger à aucune disposition légale ou conventionnelle (Code du travail article L 1233-24-4).

Lorsque l'accord n'est que « partiel », c'est-à-dire porte seulement sur le PSE, ou sur celui-ci et une partie de la procédure, il doit être complété par un document de l'employeur portant sur les points manquants

Point de départ des négociations La négociation de cet accord peut être engagée :
-  en amont de la procédure de consultation du comité, c'est-à-dire avant sa 1e réunion ; le seul fait d'ouvrir la négociation avant cette réunion ne peut pas constituer une entrave au fonctionnement de l'institution ;
-  parallèlement à la procédure consultative, l'ouverture de la négociation étant annoncée lors de la 1e réunion (la "R1") ;
-  en cours de procédure consultative.
Conditions de validité de l'accord Pour être valable, l'accord doit être signé par une ou plusieurs organisations syndicales représentatives ayant recueilli au moins 50 % des suffrages exprimés en faveur d'organisations reconnues représentatives au 1er tour des dernières élections des titulaires au CSE, quel que soit le nombre de votants (Code du travail article L 1233-24-1).
Contenu minimum de l'accord L'accord porte au minimum sur le contenu du PSE. Il peut aussi porter sur les éléments suivants :
-  les modalités d'information et de consultation du CSE ;
-  la pondération et le périmètre d'application des critères d'ordre des licenciements ;
-  le calendrier des licenciements ;
-  le nombre de suppressions d'emploi et catégories professionnelles concernées ;
-  les modalités de mise en œuvre des mesures de formation, d'adaptation et de reclassement.Les points sur lesquels l'accord ne porte pas doivent être précisés dans le document unilatéral élaboré par l'employeur après la dernière réunion du comité
Prise en compte des risques psychosociaux L'employeur identifie et évalue les conséquences de la réorganisation de l'entreprise sur la santé et la sécurité physique et mentale des travailleurs. En présence d'un risque, il arrête des mesures précises et concrètes de prévention et de protection, y compris en cas de cessation d'activité de l'entreprise.

Le Dreets, lorsqu'il est saisi de la demande d'homologation ou de validation du PSE, vérifie que le CSE a été régulièrement informé et consulté et que l'employeur a arrêté les mesures adéquates. Par exemple, l'employeur remplit ses obligations s'il adresse au CSE une note d'impact identifiant et analysant précisément les risques selon les phases de la réorganisation, décrivant la méthodologie retenue et prévoyant un plan d'action détaillé et concret.

Spécificité concernant les risques psychosociaux C'est à l'employeur qu'il incombe de prendre les mesures de prévention des risques psychosociaux, mais les partenaires sociaux peuvent les intégrer dans l'accord collectif majoritaire portant PSE. Dans ce cas, le Dreets vérifie seulement que le CSE a été régulièrement informé, et il tient compte du fait que les mesures ont été négociées pour apprécier si elles sont propres à prévenir les risques et à en protéger les travailleurs
Demande de validation Demande d'homologation
Envoi au Dreets L'accord collectif est transmis au Dreets pour validation.

Il est accompagné, pour homologation, du document unilatéral établi par l'employeur lorsque l'accord n'est que partiel.

En l'absence d'accord collectif ou en cas d'accord partiel, le document unilatéral établi par l'employeur est transmis au Dreets pour homologation, après consultation régulière du CSE
Réponse du Dreets Lorsque le dossier est complet, le Dreets en informe, sans délai l'employeur, le CSE ainsi que les organisations syndicales représentatives. Cette information mentionne la date faisant courir le délai d'instruction de la demande
Etendue du contrôle Le Dreets apprécie globalement le projet au regard des critères suivants (il s'agit d'un contrôle "limité" :

- régularité et qualité du dialogue social ;
- proportionnalité des mesures sociales d'accompagnement à la taille de l'entreprise, à ses moyens (ou à ceux de l'unité économique et sociale ou du groupe auquel elle appartient), à la nature du projet ;
- prise en compte des efforts d'anticipation de l'entreprise ;
- réponses de l'employeur aux avis, observations, propositions et injonctions de l'administration ;
- avis du CSE.

Après avoir procédé à une appréciation globale du projet, le Dreets vérifie :

-  la conformité du document aux dispositions législatives et aux stipulations conventionnelles ; ainsi, si un accord collectif prévoit des obligations en matière de reclassement externe s'imposant à l'employeur au stade de l'élaboration du PSE, l'administration, à laquelle il appartient alors d'interpréter les stipulations conventionnelles, doit s'assurer que ce plan est conforme à ces stipulations  ;
-  la régularité de la procédure d'information-consultation du CSE ;
-  que l'employeur a prévu le recours au contrat de sécurisation professionnelle ou la mise en place du congé de reclassement ;
-  le cas échéant, que l'employeur a mis en œuvre ses obligations en matière de recherche d'un repreneur ;
-  que l'employeur a respecté ses obligations en matière de prévention des risques et de protection de la santé et de la sécurité des salariés ;
-  le respect par le PSE des exigences décrites n° 90245 s.

Points précis du contrôle du Dreets Après appréciation globale du projet, le Dreets vérifie que :

-  l'accord collectif a été conclu aux conditions de majorité requises, que les personnes l'ayant signé avaient la qualité pour le faire  et que le syndicat signataire remplit bien les critères de représentativité, dont celui de transparence financière ;
-  le contenu de cet accord est conforme aux exigences légales et conventionnelles ;
-  la procédure d'information-consultation du CSE a été régulière, au regard des textes applicables ou, le cas échéant, de stipulations particulières fixées en application de cet accord ou d'un accord de méthode ;
-  le PSE contient les mesures obligatoires ;
-  l'employeur a respecté ses obligations en matière de prévention des risques et de protection de la santé et de la sécurité des salariés.

Le PSE est examiné en détail en fonction des critères suivants (le contrôle est beaucoup plus strict) :

-  les moyens de l'entreprise, de l'unité économique et sociale et du groupe ;
-  les mesures d'accompagnement prévues au regard de l'importance du projet de licenciement (situation et, en particulier, employabilité des salariés au regard du marché du travail et situation du ou des territoires où les licenciements seront mis en œuvre) ;
-  le respect par le PSE des exigences décrites n° 90245 s.
-  les efforts de formation et d'adaptation de l'employeur dans le cadre de son obligation de reclassement et du plan de développement des compétences. À ce titre, le Dreets vérifie que l'employeur assure l'adaptation du salarié au poste de travail, prévoit des mesures au profit de ceux âgés d'au moins 45 ans et des actions de formation au développement des compétences ainsi qu'à la lutte contre l'illettrisme ; les exigences du Dreets seront plus fortes si l'entreprise n'a pas mis en œuvre de formations depuis longtemps.
-  les mesures d'accompagnement prévues au regard de l'importance du projet de licenciement (situation et, en particulier, employabilité des salariés au regard du marché du travail et situation du ou des territoires où les licenciements seront mis en œuvre) ;
- le fait que l'employeur a respecté ses obligations en matière de prévention des risques et de protection de la santé et de la sécurité des salariés.

Décision du Dreets Le Dreets notifie sa décision, qui doit être motivée, dans un délai de 15 jours à compter de la réception du dossier complet, à l'employeur, au CSE et aux organisations syndicales représentatives signataires de l'accord.

Le silence gardé par le Dreets pendant ce délai vaut validation.

L'employeur doit alors transmettre copie de sa demande et de l'accusé de réception au CSE et aux organisations syndicales signataires.

En cas d'accord collectif partiel complété par un document unilatéral, et bien que le Dreets ait 21 jours pour homologuer ce dernier, il instruira le dossier dans les 15 jours, afin de faire une analyse globale. Pour ce faire, il s'assurera, dès réception de l'accord, qu'il a bien reçu le document unilatéral. Une seule décision sera prise, portant à la fois sur la validation de l'accord et l'homologation du document

Le Dreets notifie sa décision, qui doit être motivée, dans un délai de 21 jours à compter de la réception du dossier complet, à l'employeur et au CSE.

Le silence gardé par le Dreets pendant ce délai vaut homologation. L'employeur doit alors transmettre copie de sa demande et de l'accusé de réception au comité.

La décision d'homologation fait l'objet des mêmes formalités de publicité que la décision de validation

Le PSE doit comporter, dès sa première présentation au comité social et économique, sous peine de nullité, des mesures concrètes et précises pour faciliter le reclassement du personnel et éviter ainsi des licenciements ou en limiter le nombre. En effet les représentants du personnel doivent pouvoir formuler leur avis, suggestions et propositions en toute connaissance de cause.

Il ne suffit pas que l’employeur fasse des propositions aux salariés pour qu’il remplisse son obligation de reclassement. Encore faut-il que ces offres soient suffisamment sérieuses et effectives.

Le plan de sauvegarde de l’emploi s’applique à tous les salariés appartenant aux catégories professionnelles concernées par le projet de licenciement économique. Le PSE peut contenir des mesures réservées à certains salariés à la condition que tous les salariés de l’entreprise placés dans une situation identique puissent bénéficier de l’avantage ainsi accordé et que les règles déterminant les conditions de cet avantage soient préalablement définies et contrôlables.

L’employeur doit prendre toutes les mesures possibles pour éviter les licenciements ou assurer le reclassement des salariés, et non pas seulement une d’entre elles. L’employeur doit envisager toutes les possibilités de reclassement que les moyens de l’entreprise lui permettent de mettre en œuvre, en tenant compte des propositions du comité. Même s’il prend une mesure satisfaisante, il peut voir le PSE et les licenciements annulés si d’autres mesures pouvaient être proposées aux salariés.

 

Quelles sont les mentions obligatoires d'un PSE ?

S'il n'y a pas de modèle type de plan de sauvegarde de l'emploi, sans qu'il s'agisse d'une liste exhaustive, le code du travail présente divers types de mesures se rattachant de façon directe ou indirecte à un objectif de reclassement professionnel.

Le PSE doit prévoir des mesures telles que, par exemple :

    • Des actions en vue du reclassement interne des salariés sur des emplois relevant de la même catégorie d'emplois ou équivalents à ceux qu'ils occupent ou, sous réserve de l'accord exprès des salariés concernés, sur des emplois de catégorie inférieure.
    • Des créations d'activités nouvelles par l'entreprise.
    • Des actions favorisant le reclassement externe à l'entreprise, notamment par le soutien à la réactivation du bassin d'emploi ; ces dispositions qui participent aux actions de créations d'emplois ou d'activités externes à l'entreprise revêtent une dimension toute particulière dans les bassins d'emploi les plus affectés par les restructurations.
    • Des actions de soutien à la création d'activités nouvelles ou à la reprise d'activités existantes par les salariés.
    • Des actions de formation, de validation des acquis de l'expérience ou de reconversion de nature à faciliter le reclassement interne ou externe des salariés sur des emplois équivalents.
    • Des mesures d'aménagement du temps de travail ainsi que des mesures de réduction du volume des heures supplémentaires effectuées de manière régulière lorsque ce volume montre que l'organisation du travail de l'entreprise est établie sur la base d'une durée collective manifestement supérieure à 35 heures hebdomadaires ou 1 600 heures par an et que sa réduction pourrait préserver tout ou partie des emplois dont la suppression est envisagée.

Les actions inscrites dans le plan de sauvegarde de l'emploi doivent être définies en cohérence avec les dispositifs d'aide au reclassement tels que le contrat de sécurisation professionnelle et le congé de reclassement (dont les conditions de mise en œuvre doivent être indiquées dans le plan de sauvegarde de l'emploi).

Quelles sont les mentions facultatives d'un PSE (qu'il faut négocier) ?

D’autres mesures, facultatives cette fois-ci, peuvent être présentées dans le cadre d’un PSE et sont aussi l'objet des négociations. La quasi-totalité des PSE des grands groupes comportent par exemple actuellement des indemnités majorées de rupture du contrat de travail. L’employeur peut s’engager dans le PSE à verser une indemnité de licenciement majorée par rapport à l’indemnité légale ou conventionnelle. Les juges estiment qu’il peut s’agir d’une mesure de nature à favoriser le reclassement des salariés licenciés. La Directte ne conditionne pas les validations ou homologations à l’existence de telles mesures.

La liste est longue des mesures facultatives pouvant être ajoutées dans un PSE :

  • Indemnité de reclassement rapide,
  • Dispositifs pour prévoir la possibilité de départs anticipés,
  • Aides financières renforcées pour les reclassements externes (selon par exemple la taille de l’entreprise d’accueil),
  • Aides renforcées à la création d’entreprise,
  • Mise en place d’un système de préretraites d’entreprise, visant à permettre aux salariés, sous certaines conditions d’âge de cesser de manière totale leur activité professionnelle avant l’âge légal de la retraite, en percevant une allocation de remplacement,…

Quel est le rôle du CSE dans un PSE ?

Dans tous les cas, le Comité peut lors des réunions d’information-consultation, faire des suggestions et des propositions alternatives sur les mesures envisagées et sur le projet de restructuration, notamment en vue d’éviter des licenciements ou d’améliorer le PSE. L’employeur est tenu de les étudier et de donner une réponse motivée dans les délais prévus pour que le Comité rende son avis.